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    Amie des heures où aucun être ne reste,
    où tout se refuse au cœur amer ;
    consolatrice dont la présence atteste
    tant de caresses qui flottent dans l'air

    Si l'on renonce à vivre, si l'on renie
    ce qui était et ce qui peut arriver
    pense-t-on jamais assez à l'insistante amie
    qui à côté de nous fait son œuvre de fée.

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     Que ton feu me dévore !
     Plaisir ou bien effroi,
     Tout me ravit ; j'adore
     Tout ce qui vient de toi,
     Et la joie ou les larmes,
     Tout a les mêmes charmes.

     Ta voix qui se courrouce,
     Quand j'en étais sevré,
     Pourtant semble plus douce
     A mon cœur enivré
     Que les chansons lointaines
     Qui tombent des fontaines.

     ...

  • Reste tranquille, si soudain
    l'Ange à ta table se décide ;
    efface doucement les quelques rides
    que fait la nappe sous ton pain.

    Tu offriras ta rude nourriture
    pour qu'il en goûte à son tour,
    et qu'il soulève à sa lèvre pure
    un simple verre de tous les jours.

    Ingénuement, en ouvrier céleste,
    il prête à tout une calme attention ;...

  • Reste. N'allume pas la lampe. Que nos yeux
    S'emplissent pour longtemps de ténèbres, et laisse
    Tes bruns cheveux verser la pesante mollesse
    De leurs ondes sur nos baisers silencieux.

    Nous sommes las autant l'un que l'autre. Les cieux
    Pleins de soleil nous ont trompés. Le jour nous blesse.
    Voluptueusement berçons notre faiblesse
    Dans l'océan du soir...