• L’automne va finir : au milieu du ciel terne,
    Dans un cercle blafard et livide que cerne
    Un nuage plombé, le soleil dort ; du fond
    Des étangs remplis d’eau monte un brouillard qui fond
    Collines, champs, hameaux dans une même teinte ;
    Sur les carreaux la pluie en larges gouttes tinte ;
    La froide bise siffle ; un sourd frémissement
    Sort du sein des...

  •  

    L’HIVER est venu. Ma vitre est glacée.
    Je n’y vois plus rien que du givre épais.
    La lumière pâle est comme baissée,
    Mais elle m’apporte un long jour de paix.

    Pour écrire un vers blanc comme la neige,
    Je trempe ma plume en l’encrier noir ;
    Un vol de flocons aussitôt m’assiège :
    Ce sont des pensers qui viennent me voir !

    Légers, je les...

  •  
    L’ombre ici-bas la moins transparente, c’est l’âme.

    L’homme est l’énigme étrange et triste de la femme,
    Et la femme est le sphinx de l’homme. Sombre loi !
    Personne ne connaît mon gouffre, excepté moi.
    Et moi-même, ai-je été jusqu’au fond ? Mon abîme
    Est sinistre, surtout par le côté sublime ;
    Et l’hydre est là, tenant mon âme, et la mordant.
    ...

  • O vous, race des dieux, phalange incorruptible,
    Electeurs brevetés des morts et des vivants;
    Porte-clefs éternels du mont inaccessible,
    Guidés, guédés, bridés, confortables pédants!
    Pharmaciens du bon goût, distillateurs sublimes,
    Seuls vraiment immortels, et seuls autorisés;
    Qui, d'un bras dédaigneux, sur vos seins magnanimes,
    Secouant le tabac de vos...

  • étant dans sa litière durant la maladie du roi


    Si la douleur de mon esprit
    Je pouvais montrer par parole
    Ou la déclarer par écrit,
    Oncques ne fut si triste rôle ;
    Car le mal qui plus fort m'affole
    Je le cache et couvre plus fort ;
    Pourquoi n'ai rien qui me console,
    Fors l'espoir de la douce mort.

    Je sais que je ne dois celer...

  • Las ! tant malheureuse je suis,
    Que mon malheur dire ne puis,
    Sinon qu'il est sans espérance :
    Désespoir est déjà à l'huis
    Pour me jeter au fond du puits
    Où n'a d'en saillir apparence.

    Tant de larmes jettent mes yeux
    Qu'ils ne voient terre ni cieux,
    Telle est de leur pleur abondance.
    Ma bouche se plaint en tous lieux,
    De mon coeur...