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    Viens, les heures d’amour sont furtives et rares…
    Le jardin matinal est plein d’oiseaux bizarres.

    Chère, je te convie à ce royal festin.
    Je ne veux pas jouir seule de ce matin.

    L’aube heurte le ciel comme une porte close.
    Viens boire la rosée au cœur blond de la rose.

    Bois la rosée ainsi qu’une fraîche liqueur.
    Mon cœur est une rose et je t’...

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    La croisée est ouverte; il pleut
    Comme minutieusement,
    A petit bruit et peu à peu,
    Sur le jardin frais et dormant,

    Feuille à feuille, la pluie éveille
    L'arbre poudreux qu'elle verdit;
    Au mur, on dirait que la treille
    S'étire d'un geste engourdi.

    L'herbe frémit, le gravier tiède
    Crépite et l'on croirait là-bas...

  • Sous les rayons vivants de tes chaudes prunelles
    Le jardin de mon cœur fleurit abondamment,
    Et l’encens de ses fleurs transparentes et belles
    Parfume la splendeur tiède du ciel charmant.

    La fraîcheur des ruisseaux baigne d’un doux murmure
    Le sommeil lent et sourd des bois extasiés :
    Le vent harmonieux bruit sous leur ramure
    Et les gazhels d’Hudhud...

  • Cinq heures. — Je me lève et je passe au jardin.
    O fraîcheur, ô silence, ô minute d’Éden !
    O solitude, ô paix ! l’aurore vient de naître.
    Nul voisin ne se montre encore à sa fenêtre !
    Le soleil, aux rayons à peine réveillés,
    Éclabousse de feux les feuillages mouillés.
    Tout est charmant et pur ! et mon regard se pose,
    Candide et réjoui, sur une jeune...

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        Fane-toi, beau jardin dont j’aimais les odeurs,
        Où s’attardaient, plaintifs et las, les vents rôdeurs.
        Que périssent demain tes miels et tes odeurs !

        Et que d’infâmes vers rongent le cœur des roses !
        Que penchent les pavots et les pivoines closes !
        O jardin, que le soir fasse mourir tes roses !

        Vienne le vent mauvais qui...

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    Le monde est un jardin de plaisir et de mort,
    Où l’ombre sous les bleus feuillages semble attendre,
    Où la rose s’effeuille avec un bruit de cendre,
    Où le parfum des lys est volontaire et fort ?

    Parmi les lys nouveaux et les roses suprêmes,
    Nous mêlons nos aveux à d’antiques sanglots…
    Le monde est le jardin où tout meurt, les pavots
    Et les...

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    Les heures ont éteint le feu de mes vertèbres,
    Et leur morne lourdeur a pesé sur mon front…
    Voici que les lointains trop clairs s’attendriront
    Et la nuit m’ouvrira son jardin de ténèbres.

    Solitaire, tandis que le temps coule et fuit,
    Je cueillerai les fleurs du regret et du songe.
    Reconnaissante au doux charme qui se prolonge,
    J’offrirai le...

  • Voici l'heure où le pré, les arbres et les fleurs
    Dans l'air dolent et doux soupirent leurs odeurs.

    Les baies du lierre obscur où l'ombre se recueille
    Sentant venir le soir se couchent dans leurs feuilles,

    Le jet d'eau du jardin, qui monte et redescend,
    Fait dans le bassin clair son bruit rafraîchissant ;

    La paisible maison respire au jour qui...

  • La jeune dame qui marche sur la pelouse
    Devant l'été paré de pommes et d'appas,
    Quand des heures Midi comblé jette les douze,
    Dans cette plénitude arrêtant ses beaux pas,

    A dit un jour, tragique abandonnée - épouse -
    A la Mort séduisant son Poëte : "Trépas !
    Tu mens. Ô vain climat nul ! je me sais jalouse
    Du faux Éden que, triste, il n'habitera pas."...

  • À Alphonse Daudet.

    Ma vie, où des vols de colombes
    Neigeaient autrefois dans l'azur,
    Est un jardin rempli de tombes
    Avec des hiboux sur son mur.

    Les mornes oiseaux d'heure en heure
    S'éveillent au fond des cyprès,
    Et chacun d'eux ulule et pleure
    Sur mes vaeux devenus regrets.

    Leur cri lugubre et monotone
    Chante les...