Istvan Benko, magnat de la steppe hongroise,
Le même qui portait au pouce une turquoise
Qui pâlissait, dit-on, quand le Turc arrivait,
Prodigua follement tout le bien qu’il avait.
Ce seigneur fut vraiment magnifique ; et l’on conte
Que, dans un bal champêtre, un jour, le riche comte
Vint, parmi ses vassaux, en superbes habits,
Couvert de...
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À Mounet-SullyI
– Demandez les journaux du soir… la Liberté...
La France...
À cet appel sans cesse répété
Par la vieille marchande à la voix âpre et claire,
Je faisais halte au coin du faubourg populaire
Dont les vitres flambaient dans le soleil couchant,
Et prenais... -
Parfois un caprice te prend,
Méchante amie, et tu me boudes,
Et sur le balcon tu t’accoudes
Malgré l’eau qui tombe à torrent.Mais, vois-tu ! Mars, avec ses grêles
A qui succède un gai soleil,
Chère boudeuse, est tout pareil
A nos fugitives querelles.Tels ces oiseaux, pauvres petits,
Sous ce fronton, pendant l’averse,
Et... -
EN province. Dans un affreux café-concert.
Ayant manqué le train, voulant être à couvert,
― Il pleuvait, ― j’entrai là pour tuer ma soirée.
La salle, dans le goût moresque décorée,
― Alhambra de bois peint, Généralife en toc, ―
Prétendait évoquer on ne sait quel Maroc.
Là, dans d’étroits fauteuils, vrais sièges de torture,
Tous... -
Amour plus que beauté me touche,
O ma mignonne, et j’aime mieux,
Bien mieux, ton regard que tes yeux,
Et ton sourire que ta bouche !Pour tout le monde, c’est certain,
Ta bouche est enfantine et ronde,
Et tes yeux sont pour tout le monde
Bleus comme le ciel du matin.Mais pour moi seul, tu me le jures,
Brilla ce regard attendri... -
Dans le bourg sur la Loire, on conte que naguère
La Pucelle passa sur sa jument de guerre
Et dit aux habitants :« Armez-vous et venez. »
Un échevin, suivi de vieillards consternés,
Lui répondit :« Hélas ! pauvres gens que nous sommes !
Les Anglais ont tué les... -
Le soleil d’Austerlitz n’a pas encore lui.Avec ses maréchaux groupés autour de lui,
Et, près de là, tenant en réserve sa garde,
Du haut d’un mamelon Napoléon regarde,
Monté sur un cheval gris aux naseaux fumants,
S’en aller, l’arme au bras, les derniers régiments
Vers la plaine déjà par d’autres occupée.
Tous l’acclament. Aux chefs saluant de... -
À Ernest d’Hervilly.Frissonnant jusque dans la moelle,
Pelé, funèbre et moribond,
Le vieux singe, près de son poêle,
Tousse en râlant et se morfond.Composant, malgré sa détresse,
La douleur qui le fait mourir,
Il geint : mais sa plainte s’adresse
Au public qu’il veut attendrir.Comme une phthisique de drame
Pâmée... -
Au Louvre, je vais voir ces délicats modèles
Qui montrent aux oisifs les richesses d’un port,
Je connais l’armement des vaisseaux de haut-bord
Et la voilure des avisos-hirondelles.J’aime cette flottille avec ses bagatelles,
Le carré d’Océan qui lui sert de support,
Ses petits canons noirs se montrant au sabord,
Et ses mille haubans fins comme des... -
Devant le cabaret qui domine la rade,
Maître Jean Goëllo, le rude camarade,
Le vieux gabier manchot du bras droit, le marin
Qu’un boulet amputa le jour de Navarin,
La pipe aux dents, buvant son grog par intervalles,
Conte, les soirs d’été, ses histoires navales
Aux pilotins du port attablés avec lui.« Oui, mes enfants, voilà soixante ans aujourd’hui...