• J'étais un arbre en fleur où chantait ma Jeunesse,
    Jeunesse, oiseau charmant, mais trop vite envolé,
    Et même, avant de fuir du bel arbre effeuillé,
    Il avait tant chanté qu'il se plaignait sans cesse.

    Mais sa plainte était douce, et telle en sa tristesse
    Qu'à défaut de témoins et de groupe assemblé,
    Le buisson attentif avec l'écho troublé
    Et le...

  • Octobre.

    Après la moisson faite et tous les blés rentrés,
    Quand depuis plus d'un mois les champs sont labourés,
    Qu'il gèlera demain, et qu'une fois encore
    L'Automne, du plus haut des coteaux qu'elle dore,
    Se retourne en fuyant, le front dans un brouillard,
    Oh ! que la plaine est triste autour du boulevard !
    C'est au premier coup doeil une morne...

  • La voilà, pauvre mère, à Paris arrivée
    Avec ses deux enfants, sa fidèle couvée !
    Veuve, et chaste, et sévère, et toute au deuil pieux,
    Elle les a, seize ans, élevés sous ses yeux
    En province, en sa ville immense et solitaire,
    Déserte à voir, muette autant qu'un monastère,
    Où croît l'herbe au pavé, la triste fleur au mur,
    Au coeur le souvenir long,...

  • Dans ce cabriolet de place j'examine
    L'homme qui me conduit, qui n'est plus que machine
    Hideux, à barbe épaisse, à longs cheveux collés :
    Vice et vin et sommeil chargent ses yeux soulés.
    Comment l'homme peut-il ainsi tomber ? pensais-je,
    Et je me reculais à l'autre coin du siège.
    - Mais Toi, qui vois si bien le mal à son dehors,
    La crapule poussée à l'...

  • Quand l'avenir pour moi n'a pas une espérance,
    Quand pour moi le passé n'a pas un souvenir,
    Où puisse, dans son vol qu'elle a peine à finir,
    Un instant se poser mon âme en défaillance ;

    Quand un jour pur jamais n'a lui sur mon enfance,
    Et qu'à vingt ans ont fui, pour ne plus revenir,
    L'Amour aux ailes d'or, que je croyais tenir,
    Et la Gloire...

  • Ô laissez-vous aimer !... ce n'est pas un retour,
    Ce n'est pas un aveu que mon ardeur réclame ;
    Ce n'est pas de verser mon âme dans votre âme,
    Ni de vous enivrer des langueurs de l'amour ;

    Ce n'est pas d'enlacer en mes bras le contour
    De ces bras, de ce sein ; d'embraser de ma flamme
    Ces lèvres de corail si fraîches ; non, madame,
    Mon feu pour...

  • Oui, cher Zénon, oui, ma lyre est bizarre,
    Je le sais trop ; d'un étrange compas
    Elle est taillée, et ne s'arrondit pas
    D'un beau contour sous le bras du Pindare.

    Le chant en sort à peine, et comme avare ;
    Nul groupe heureux n'y marierait ses pas :
    Mais écoutez, et dites-vous tout bas
    Quel son y gagne en sa douceur plus rare.

    Demandez-...

  • À mon ami Victor Hugo.

    Mon ami, vous voilà père d'un nouveau-né ;
    C'est un garçon encor : le Ciel vous l'a donné
    Beau, frais, souriant d'aise à cette vie amère ;
    A peine il a coûté quelque plainte à sa mère.
    Il est nuit ; je vous vois... à doux bruit, le sommeil
    Sur un sein blanc qui dort a pris l'enfant vermeil,
    Et vous, père, veillant contre la...

  • Printemps, que me veux-tu ? pourquoi ce doux sourire,
    Ces fleurs dans tes cheveux et ces boutons naissants ?
    Pourquoi dans les bosquets cette voix qui soupire,
    Et du soleil d'avril ces rayons caressants ?

    Printemps si beau, ta vue attriste ma jeunesse ;
    De biens évanouis tu parles à mon coeur ;
    Et d'un bonheur prochain ta riante promesse
    M'apporte...

  • Chacun en sa beauté vante ce qui le touche,
    L'amant voit des attraits où n'en voit point l'époux ;
    Mais que d'autres, narguant les sarcasmes jaloux,
    Vantent un poil follet au-dessus d'une bouche ;

    D'autres, sur des seins blancs un point comme une mouche ;
    D'autres, des cils bien noirs à des yeux bleus bien doux,
    Ou sur un cou de lait des cheveux d'un...