• À Georges d'Esparbés.

    Le firmament luit comme un cimeterre
    Et les routes sont pâles comme des mortes.

    Les Vents - allègres paladins -
    Sont partis devers
    Les mers ;
    Montés sur les éthéréens chevaux
    Au fier galop de leurs sonnants sabots
    Ils sont partis devers
    Les mers.

    Une paix maléfique plane comme un oiseau
    Faisant...

  • À Rodolphe Salis.

    Plus d'ardentes lueurs sur le ciel alourdi,
    Qui semble tristement rêver.
    Les arbres, sans mouvement,
    Mettent dans le loin une dentelle grise. -
    Sur le ciel qui semble tristement rêver,
    Plus d'ardentes lueurs. -

    Dans l'air gris flottent les apaisements,
    Les résignations et les inquiétudes.
    Du sol consterné monte...

  • Seule à jamais ! couchée au sol, l'âme troublée,
    Pleine d'un regard vague et d'un désir sans fin,
    Elle reste immobile, et sa pose accablée
    Du contour délicat accuse le dessin.
    Son corps souple et charmant fait une lueur blanche
    Entre les durs profils des rocs irréguliers ;
    La tunique aux plis droits a glissé sur sa hanche,
    Des bandelettes d'or les...

  • À Mademoiselle Marguerite Coutanseau.

    La neige tombe en paix sur Paris qui sommeille,
    De sa robe d'hiver à minuit s'affublant.
    Quand la ville surprise au grand jour se réveille,
    Fins clochers, dômes ronds, palais vieux, tout est blanc.

    Moins rudes sont les froids, et la Seine charrie :
    D'énormes blocs de glace aux longs reflets vitreux
    ...

  • À Léo Joubert.

    Là-bas, vers l'horizon du frais pays herbeux
    Où la rivière, lente et comme désoeuvrée,
    Laisse boire à son gué de longs troupeaux de boeufs,
    Une grande bataille autrefois fut livrée.

    C'était, comme aujourd'hui, par un ciel de printemps.
    Dans ce jour désastreux, plus d'une fleur sauvage,
    Qui s'épanouissait, flétrie en peu d'instants,...

  • Je voudrais aller me promener dans les bois ;
    j'aurais un grand chapeau, une robe légère,
    je me griserais d'air et de bonne lumière,
    et tu me rapprendrais à marcher à ton bras.

    Je voudrais aller dans un grand bois, un vieux bois,
    où l'on dit que les fées se promènent encore ;
    peut-être en attendant du soir jusqu'à l'aurore,
    qu'une d'elles nous...

  • Les grands appartements qu'elle habite l'hiver
    Sont tièdes. Aux plafonds, légers comme l'éther,
    Planent d'amoureuses peintures.

    Nul bruit ; partout les voix, les pas sont assoupis
    Par la laine opulente et molle des tapis
    Et l'ample velours des tentures.

    Aux fenêtres, dehors, la grêle a beau sévir,
    Sous ses balles de glace à peine on sent frémir...

  • Viennent les ans ! J'aspire à cet âge sauveur
    Où mon sang coulera plus sage dans mes veines,
    Où, les plaisirs pour moi n'ayant plus de saveur,
    Je vivrai doucement avec mes vieilles peines.

    Quand l'amour, désormais affranchi du baiser,
    Ne me brûlera plus de sa fièvre mauvaise
    Et n'aura plus en moi d'avenir à briser,
    Que je m'en donnerai de tendresse à...

  • Il est plus d'un silence, il est plus d'une nuit,
    Car chaque solitude a son propre mystère :
    Les bois ont donc aussi leur façon de se taire
    Et d'être obscurs aux yeux que le rêve y conduit.

    On sent dans leur silence errer l'âme du bruit,
    Et dans leur nuit filtrer des sables de lumière.
    Leur mystère est vivant : chaque homme à sa manière
    Selon ses...

  • On connaît toujours trop les causes de sa peine,
    Mais on cherche parfois celles de son plaisir ;
    Je m'éveille parfois l'âme toute sereine,
    Sous un charme étranger que je ne peux saisir.

    Un ciel rose envahit mon être et ma demeure,
    J'aime tout l'univers, et, sans savoir pourquoi,
    Je rayonne. Cela ne dure pas une heure,
    Et je sens refluer les...