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    L’exil n’interrompt pas l’hymen de deux pensées
    Et les fêtes du cœur une fois commencées.
    Lorsqu’un amour sans tache a fait deux âmes sœurs,
    Rien ne les sèvre plus de ses chastes douceurs.
    Malgré les océans, les steppes, les montagnes,
    Elles vont, dans la vie, ainsi que deux compagnes,
    Comme aux soirs de printemps, où, sous les églantiers,
    ...

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    BÉATRIX

    Mon nom est allégresse, heureux qui le prononce !
    Venez dans mes jardins où l’on est transformé ;
    J’écarterai de vous les cailloux et la ronce.

    Cueillez votre bonheur où Dieu vous l’a semé.
    Pour entrer dans la gloire, où je veux vous conduire,
    C’est peu d’avoir souffert, si l’on n’a pas aimé,

    Si l’on n’a pas compris le ciel dans un...

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    J'eus un rêve : le mur des siècles m'apparut.

    C'était de la chair vive avec du granit brut,
    Une immobilité faite d'inquiétude,
    Un édifice ayant un bruit de multitude,
    Des trous noirs étoilés par de farouches yeux,
    Des évolutions de groupes monstrueux,
    De vastes bas-reliefs, des fresques colossales ;
    Parfois le mur s'ouvrait et laissait voir...

  • Lecteur paisible et bucolique,
    Sobre et naïf homme de bien,
    Jette ce livre saturnien,
    Orgiaque et mélancolique.

    Si tu n'as fait ta rhétorique
    Chez Satan, le rusé doyen,
    Jette ! tu n'y comprendrais rien,
    Ou tu me croirais hystérique.

    Mais si, sans se laisser charmer,
    Ton oeil sait plonger dans les gouffres,
    Lis-moi, pour...

  • Il est de longs soupirs qui traversent les âges
    Pour apprendre l'amour aux âmes les plus sages.
    Ô sages ! De si loin que ces soupirs viendront,
    Leurs brûlantes douceurs un jour vous troubleront.

    Et s'il vous faut garder parmi vos solitudes
    Le calme qui préside aux sévères études,
    Ne risquez pas vos yeux sur les tendres éclairs
    De l'orage éternel enfermé...

  • Jadis plus d'un amant, aux jardins de Bourgueil,
    A gravé plus d'un nom dans l'écorce qu'il ouvre,
    Et plus d'un coeur, sous l'or des hauts plafonds du Louvre,
    A l'éclair d'un sourire a tressailli d'orgueil.

    Qu'importe ? Rien n'a dit leur ivresse ou leur deuil.
    Ils gisent tout entiers entre quatre ais de rouvre
    Et nul n'a disputé, sous l'herbe qui les couvre,...

  • L'univers, c'est un livre, et des yeux qui le lisent.

    Ceux qui sont dans la nuit ont raison quand ils disent :
    Rien n'existe ! Car c'est dans un rêve qu'ils sont.

    Rien n'existe que lui, le flamboiement profond,
    Et les âmes, les grains de lumière, les mythes,
    Les moi mystérieux, atomes sans limites,
    Qui vont vers le grand moi, leur centre et leur...

  • Quand le livre où s'endort chaque soir ma pensée,
    Quand l'air de la maison, les soucis du foyer,
    Quand le bourdonnement de la ville insensée
    Où toujours on entend quelque chose crier,

    Quand tous ces mille soins de misère ou de fête
    Qui remplissent nos jours, cercle aride et borné,
    Ont tenu trop longtemps, comme un joug sur ma tête,
    Le regard de mon âme...

  • Ton Souvenir est comme un livre bien aimé,
    Qu'on lit sans cesse, et qui jamais n'est refermé,
    Un livre où l'on vit mieux sa vie, et qui vous hante
    D'un rêve nostalgique, où l'âme se tourmente.

    Je voudrais, convoitant l'impossible en mes voeux,
    Enfermer dans un vers l'odeur de tes cheveux ;
    Ciseler avec l'art patient des orfèvres
    Une phrase...