• La jeune fille est semblable à la rose,
    Au beau jardin, sur l'épine naïve,
    Tandis que sûre et seulette repose,
    Sans que troupeau ni berger y arrive.
    L'air doux l'échauffe et l'aurore l'arrose ;
    La terre, l'eau par sa faveur l'avive.
    Mais jeunes gens et dames amoureuses
    De la cueillir ont les mains envieuses.
    La terre et l'air qui la soulaient...

  • Adieu, ville, vous command ;
    Il n'est plaisir que des champs.
    L'autre hier, trouvai Sylvette,
    Son petit troupeau gardant :
    Quand je la trouvai seulette,
    S'amour allai demandant.
    Adieu, ville, vous command ;
    Il n'est plaisir que des champs.

    "A quoi pensez-vous, bergere
    En cette fleur de quinze ans?
    La beauté passe légere,
    ...

  • Ode

    Si en un lieu solitaire
    Les ennuis me font retraire
    Pour me plaindre tout seulet,
    Si je cherche les montagnes,
    Ou des plus vertes campagnes
    Le murmurant ruisselet ;
    Lors ces choses tant secrètes,
    Bien qu'aux autres soient muettes,
    Me voyant en tel émoi,
    Toutes d'un chant pitoyable,
    Mais, hélas ! peu secourable,
    Gémissent avecque...

  • Depuis le jour qu'il me convint distraire,
    Et d'avec moy, comme voeuf m'absenter,
    Je n'ay cessé de plaindre et lamenter,
    Traisnant ma vie amerement austere.

    Me desrobant dans un bois solitaire,
    Rien ne se vient à mes yeux presenter
    Fors une horreur, qui faict espouvanter
    Mon cerveau vuide en cent doubtes contraire.

    Morne et pensif, d'une face...

  • Soit qu'esgaré par l'espesseur d'un bois,
    Ou par l'horreur de quelque antre sauvage,
    Ou soit qu'auprès d'un trepillant rivage,
    Je tranche l'air des souspirs de ma voix ;

    Soit qu'en resvant aux amoureuses loix,
    Du rossignol j'escoute le ramage,
    Ou qu'en pensant ramollir mon courage,
    Mon luth j'anime au passer de mes doigts ;

    Vers quelque...

  • Quand tu naquis en ces bas lieux
    Tous les dieux et les demi dieux
    Et les déesses plus bénines
    Gravèrent de lettres divines
    Dans ton astre bien fortuné
    "Le Délien est né !"
    Tout le Parnassien troupeau
    Chantant autour de ton berceau,
    Te prévoyant son prêtre en France,
    Disait en l'heur de ta naissance
    Sur ton front déjà couronné
    "...

  • Ce n'est pas moy qui veut d'un feint ouvrage
    Par mille vers farder sa passion,
    Ou en flatant plaire à l'affection
    De l'amoureux inconstant et vollage :

    Ce n'est pas moy, qui, surpris d'une rage,
    Trouble, insensé, de sa conception
    Le vif dessein, ny doit l'intention
    Est de se prendre en un si doux naufrage.

    Ce n'est pas moy qui tasche de...

  • En quel fleuve areneux jaunement s'écouloit
    L'or, qui blondist si bien les cheveux de ma dame ?
    Et du brillant esclat de sa jumelle flamme,
    Tout astre surpassant, quel haut ciel s'emperloit ?

    Mais quelle riche mer le coral receloit
    De cette belle levre, où mon desir s'affame ?
    Mais en quel beau jardin, la rose qui donne ame
    A ce teint vermeillet,...

  • D'où vient cela que l'envieuse rage,
    Qui les coeurs ronge, entreprend de blâmer
    Mes ans oisifs, et les vers un ouvrage
    D'un pauvre esprit et paresseux nommer,

    En m'accusant que je ne suis la trace,
    Étant dispos, de mes nobles aïeux,
    Qui ont conquis par la poudreuse place
    Et par le sang maint loyer vertueux ?

    Ou bien pourquoi me reprend-elle d...

  • Quand ma nymphette jolie
    Tourne devers moi ses yeux,
    Hors de moi s'enfuit ma vie,
    De moi navré furieux.
    Si une fois ma cruelle
    Détourne ses yeux de moi,
    Blessé de rage nouvelle,
    Je meurs en plus dur émôi.
    Que ferais-je donc pour vivre ?
    Quel jus reboirai-je, hélas ?
    Faudrait-il point que délivre
    Je me visse de ses lacs ?
    Ce...