• Quand le Soleil, la torche coutumiere
    De l'Univers, s'est dans la mer rendu,
    Et pensons voir un voile noir tendu,
    Nous engendrant la nuit familiere

    Nul ne se plaint de se voir sans lumiere,
    Parcequ'il est plus qu'assés entendu,
    Que le Soleil nous est aptes rendu,
    Pour parcourir sa carriere ordinaire.

    Sans cris, sans dueil, tu te dois...

  • O ciel vouté qui la terre bien heures,
    O feu sans poix agilement leger,
    O air humide, o vent prompt messager,
    O large mer qui la terre ceintures,

    O terre riche, ô qui ton doz peintures
    De vers thesors pour l'homme soulager,
    Bois, pres, champs, eaux, que pour nous arranger,
    Nature essay' de mille architectures,

    Quand vous verrez que les...

  • A André Rivaudeau, gentilhomme poitevin


    Le chaut qu'on sent au plus fort de l'Esté
    Ne nous rend tant la fraicheur agreable,
    Et des forests l'epaisseur delectable
    N'a onc si bien le passant arresté,

    Et a celluy qui se treuve endetté
    L'or ne plait tant, ny au captif coupable
    Remission d'un peché punissable,
    Ni à un serf la douce...

  • Prisonnier en la Conciergerie de Paris, l'an 1546,
    sur la déclaration et sur la consolation.

    Si au besoin le monde m'abandonne
    Et si de Dieu la volonté n'ordonne
    Que libertés encores on me donne
    Selon mon veuil.

    Dois-je en mon coeur pour cela mener deuil
    Et de regrets faire amas et recueil ?
    Non pour certain, mais au ciel lever l'oeil...

  • Assis au bord des eaux d'une claire fontaine
    J'ai l'oeil fixé dessus et l'esprit attentif
    Pour ouïr sourdement leur murmure plaintif
    Qui semble lamenter le tourment qui me gêne.

    Tantôt je suis assis, tantôt je me promène
    Et comme si j'étais quelque amant fugitif
    Je me cache du monde, et demeure craintif
    Pour la peur seulement qu'il connaisse ma...

  • Chanson

    J'entends la triste Philomèle
    Qui chante la nuit et le jour :
    Mais je ne puis faire comme elle
    Qui dit librement son amour.

    Je voudrais en mes tristes peines
    Me transformer en cet oiseau,
    Pour aller chanter sur les chênes
    L'ennui qui me mène au tombeau.

    J'irais sur la verte ramée
    Chanter la beauté de deux yeux,
    ...

  • Hé ! qu'est cela, Seigneur ? Vous qui êtes si doux,
    S'est-il pu rencontrer une main si cruelle
    Pour vous traiter ainsi ? Quelle fureur bourrelle
    A pu percer vos mains et vos pieds de ces clous ?

    Hélas ! tout votre corps est déchiré de coups,
    Le sang de tous côtés autour de vous ruisselle,
    Et ce chef rayonnant d'une clarté nouvelle,
    Plombé, meurtri...

  • Vous me dites toujours où tendent mes desseins,
    Et pourquoi je vous aime et vous rends du service :
    Vous pouviez bien savoir avant que je vous visse
    Quel peut être le but de l'amour des humains.

    Nous vivons dans le monde et parmi les mondains,
    Nos sexes sont divers, et le plus doux délice
    De l'homme c'est d'aimer l'amoureux exercice
    Dont vous êtes...

  • J'aime la solitude et me rends solitaire
    Pour penser librement à mes belles amours,
    Je cherche les forêts et les lieux les plus sourds
    Pour leur dire les maux qu'aux mortels je veux taire.

    Ils servent à mon deuil de loyal secrétaire,
    Recevant les soupirs que je pousse toujours ;
    C'est le trésor caché des regrets de mes jours,
    L'air en est le...

  • L'Homme, le fort Lion ; le Boeuf, et l'Aigle en pointe,
    Mathieu, Marc, Luc, et Jean ores vont accordant
    L'Orient, le Midi, le North et l'Occident,
    Et Nature, et la Loy, Grace, et Raison conjointe.

    Ninus, Cyre, Aléxandre, et César le plus cointe
    Ont esté renversez du chariot ardent :
    Le Chaldé, Perse, et Grec, et le Rommain prudent
    Ont cedé à l'...