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    Va ! marche au but suprême où marche toute chose :
    Vois, d'un souffle divin l'espace est tourmenté ;
    Quel globe est endormi ? quel astre se repose ?
    Toi seul tu prétendrais à l'immortalité !

    Attends-tu là, couché, que le désert t'apporte
    Ses fontaines d'eau vive où tu veux t'étancher ;
    Et, venu pour toi seul, que Dieu frappe à ta porte,
    Sans...

  •       Arbres dépouillés de verdure,
          Malheureux cadavres des bois,
    Que devient aujourd’hui cette riche parure
          Dont je fus charmé tant de fois ?
    Je cherche vainement, dans cette triste plaine,
    Les oiseaux, les zéphirs, les ruisseaux argentés :
    Les oiseaux sont sans voix, les zéphyrs sans haleine,
       Et les ruisseaux dans leurs cours arrêtés...

  • Souvent la vision du Poète me frappe :
    Ange à cuirasse fauve, il a pour volupté
    L’éclair du glaive, ou, blanc songeur, il a la chape,
    La mitre byzantine et le bâton sculpté.

    Dante, au laurier amer, dans un linceul se drape,
    Un linceul fait de nuit et de sérénité :
    Anacréon, tout nu, rit et baise une grappe
    Sans songer que la vigne a des feuilles, l’...

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    SYLVIA.

    Puisque pour le chrétien la vie est un combat,
    Notre plus forte armure est dans le célibat ;
    Affranchi de la chair, heureux le vierge athlète,
    L’ange contemplatif qui vit dans la retraite ;
    Heureux l’homme de Dieu !...

                                             Mon Père, écoutez-moi ;
    En toute humilité, je m’accuse avec foi ;
    ...

  • Assez longtemps dans une folle ivresse
    J'ai gaspillé les plus beaux de mes jours.
    Je fuis le bal, et je cours à la messe :
    Comme d'autels je changerai d'amours.
    Demain je prends un front grave et sévère ;
    Au lieu de vin, c'est de l'eau que je bois....
    En attendant, remplissez bien mon verre :
    Trinquons ce soir pour la dernière fois.

    Adieu vous...

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    Comme la foi chancelle et la ferveur tiédit,
    Le décret du Synode, approuvé par l’édit
    Impérial, signé du très-saint Théodose,
    En ses canons sacrés mande, ordonne et dispose
    Que l’ivraie, hérésie horrible ou culte ancien,
    Schisme ou rébellion, sera du sol chrétien
    Impitoyablement et sans délai fauchée,
    Et que, si la doctrine, hélas ! en vain...

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    Ça monte et c’est lourd — Allons, Hue !
    — Frères de renfort, votre main ?…
    C’est trop !… et je fais le gamin ;
    C’est mon Calvaire cette rue !

    Depuis Notre-Dame-Lorette…
    — Allons ! la Cayenne est au bout,
    Frère ! du cœur ! encor un coup !…
    — Mais mon âme est dans la charrette :

    Corbillard dur à fendre l’âme.
    Vers en bas l’...

  • Le mort s’en va dans le brouillard
    Avec sa limousine en planches.
    Pour chevaux noirs deux vaches blanches,
    Un chariot pour corbillard.

    Hélas ! c’était un beau gaillard
    Aux yeux bleus comme les pervenches !
    Le mort s’en va dans le brouillard
    Avec sa limousine en planches.

    Pas de cortège babillard.
    Chacun en blouse des dimanches,
    ...

  • Quand je mourrai, que l’on me mette,
    Avant de clouer mon cercueil,
    Un peu de rouge à la pommette,
    Un peu de noir au bord de l’œil ;

    Car je veux, dans ma bière close,
    Comme le soir de son aveu,
    Rester éternellement rose
    Avec du khol sous mon œil bleu.

    Pas de suaire en toile fine ;
    Mais drapez-moi dans les plis blancs
    De ma robe de...

  • ORIANE

    Ô fils resplendissants, ô fils couleurs d’étoile,
    Serez-vous le manteau d’un prince ou bien le voile

    D’une reine ?... Non, non, fils couleur du printemps,
    Je veux que vous soyez les clairs rideaux flottants
    Éployés sur le lit ardent d’une amoureuse,
    Comme un pavillon d’or sur une barque heureuse.
    Un silence. Le rouet...