• Du haut de la montagne,
    Près de Guadarrama,
    On découvre l'Espagne
    Comme un panorama.

    A l'horizon sans borne
    Le grave Escurial
    Lève son dôme morne,
    Noir de l'ennui royal ;

    Et l'on voit dans l'estompe
    Du brouillard cotonneux,
    Si loin que l'oeil s'y trompe,
    Madrid, point lumineux !

    La montagne est si haute,...

  • Les marronniers de la terrasse
    Vont bientôt fleurir, à Saint-Jean,
    La villa d'où la vue embrasse
    Tant de monts bleus coiffés d'argent.

    La feuille, hier encor pliée
    Dans son étroit corset d'hiver,
    Met sur la branche déliée
    Les premières touches de vert.

    Mais en vain le soleil excite
    La sève des rameaux trop lents ;
    La fleur...

  • Comme une grande fleur trop lourde qui défaille,
    Parfois, toute en mes bras, tu renverses ta taille
    Et plonges dans mes yeux tes beaux yeux verts ardents,
    Avec un long sourire où miroitent tes dents...
    Je t?enlace ; j?ai comme un peu de l?âpre joie
    Du fauve frémissant et fier qui tient sa proie.
    Tu souris... je te tiens pâle et l?âme perdue
    De se sentir au...

  • Une fleur passagère, une vaine peinture,
    Faisaient de mes beaux jours les plus douces clartés,
    Et dans un labyrinthe, errant de tous côtés,
    Je faisais de mon sort la douteuse aventure.

    Sans aucun soin du temps, ni de la sépulture,
    La fureur m'emportait parmi les vanités,
    Et toujours soupirant après mille beautés,
    J'écoutais de l'Amour l'agréable...

  • cueillie au printemps


    Une rose d'un mois d'avril
    Sous une étoile qui regarde
    Éveilla, malice ou mégarde,
    Mon désir pas encor viril.

    C'est ta bouche au rose grésil
    Qui fut pour ton page, Hildegarde,
    Une rose d'un mois d'avril
    Sous une étoile qui regarde.

    J'ai connu les deuils, le péril,
    Depuis, et l'angoisse hagarde !...

  • Madame, ce matin je vous offre une fleur
    Qui du sang de Narcis a pris son origine :
    Pour vous y comparer Amour vous la destine,
    Et vous vient consacrer son tige et sa couleur.

    Vous semblez un Narcis de grâce et de rigueur,
    Il avait comme vous l'apparence divine,
    De sa vive beauté l'onde fut la ruine,
    Et je crains qu'un miroir cause votre malheur !...

  • L'absurdité grandit comme une fleur fatale
    Dans le terreau des sens, des coeurs et des cerveaux ;
    En vain tonnent, là-bas, les prodiges nouveaux ;
    Nous, nous restons croupir dans la raison natale.

    Je veux marcher vers la folie et ses soleils,
    Ses blancs soleils de lune au grand midi, bizarres,
    Et ses échos lointains, mordus de tintamarres
    Et d'...

  • Que me veux-tu, chère fleurette,
    Aimable et charmant souvenir ?
    Demi-morte et demi-coquette,
    Jusqu'à moi qui te fait venir ?

    Sous ce cachet enveloppée,
    Tu viens de faire un long chemin.
    Qu'as-tu vu ? que t'a dit la main
    Qui sur le buisson t'a coupée ?

    N'es-tu qu'une herbe desséchée
    Qui vient achever de mourir ?
    Ou ton sein, prêt à...

  • Jamais coupe d'opale, où boivent les abeilles,
    Jamais perle d'azur, étoilant nos corbeilles,
    Ou vivant de notre air dans l'air vivant des blés,
    N'ont agi plus longtemps sur mes songes troublés,
    Que ce fantôme noir d'une plante momie,
    Dans son champ souterrain six mille ans endormie.
    Les jeunes soeurs d'hier, opulentes ou non,
    Ont toutes des couleurs,...

  • Quand cette belle fleur premièrement je vis,
    Qui notre âge de fer de ses vertus redore,
    Bien que sa grand' valeur je ne connusse encore,
    Si fus-je en la voyant de merveille ravi.

    Depuis, ayant le cours de fortune suivi,
    Où le Tibre tortu de jaune se colore,
    Et voyant ces grands dieux, que l'ignorance adore,
    Ignorants, vicieux et méchants à l'envi...