• Quoi ! les flots sont calmés, et les vents sans colère
    Aplanissent la route où je vais m’égarer !
    J’ai vu briller le phare, et l’onde qui s’éclaire
    Double l’affreux signal qui doit nous séparer !
    Que fait-il ? Ah ! s’il dort, il rêve son amie ;
    Bercé dans mon image, il attend le réveil :
    Comme l’onde paisible, il me croit endormie,
    Et son rêve abusé...

  • Dusses-tu me punir de rompre la première
    Le serment imprudent qui fit pleurer l’amour ;
    Dusses-tu repousser l’invincible retour
    Qui ramène vers toi mon âme tout entière ;
    Cette raison cruelle, où se cache l’orgueil,
            M’a déjà coûté tant de larmes !
            Va ! la souffrance est un écueil
            Où viennent se briser ses armes.

    Et toi,...

  • Il fait nuit : le vent souffle et passe dans ma lyre ;
    Ma lyre tristement s’éveille auprès de moi :
    On dirait qu’elle pleure un tourment, un délire ;
    On dirait qu’elle essaie à se plaindre de toi ;
    De toi, qu’elle appelait pour m’aider à t’attendre,
    Qui la rendis si vraie, et par malheur si tendre !
    Car tu ne peux ravir à ses accords touchants
    Ton nom...

  • J’étais à toi peut-être avant de t’avoir vu.
    Ma vie, en se formant, fut promise à la tienne ;
    Ton nom m’en avertit par un trouble imprévu,
    Ton âme s’y cachait pour éveiller la mienne.
    Je l’entendis un jour, et je perdis la voix ;
    Je l’écoutai longtemps, j’oubliai de répondre.
    Mon être avec le tien venait de se confondre,
    Je crus qu’on m’appelait pour...

  • Il avait dit un jour : « Que ne puis-je auprès d’elle,
    ( Elle, alors, c’était moi ! ) que ne puis-je chercher
    Ce bonheur entrevu qu’elle veut me cacher !
    Son cœur paraît si tendre ; oh ! s’il était fidèle ! »
    Puis, fixant ses regards sur mon front abattu,
    Du charme de ses yeux il m’accablait encore,
                Et ses yeux que j’adore
    Portaient jusqu’...

  •     Peut-être un jour sa voix tendre et voilée
        M’appellera sous de jeunes cyprès :
        Cachée alors au fond de la vallée,
    Plus heureuse que lui, j’entendrai ses regrets.
    Lentement, des coteaux je le verrai descendre ;
    Quand il croira ses pas et ses vœux superflus,
    Il pleurera ! ses pleurs rafraîchiront ma cendre :
    Enchaînée à ses pieds, je ne le...

  • Elle est morte pour moi, dans la tombe glacée
    Comme si le trépas l’avait déjà placée ;
    Elle vit cependant, ange exilé des cieux,
    Vrai rêve de poète, étrange et gracieux ;
    C’est bien elle toujours, elle que j’ai connue
    Au sortir de l’enfance, à quinze ans, ingénue,
    Folâtre, insouciante, ignorant sa beauté,
    S’ignorant elle-même, et jetant de côté,...

  • J’ai fait une remarque hier en te quittant.
    Sans doute j’ai mal vu ; mais quand on aime tant
    On a peur ; on se fait avec la moindre chose
    Un sujet de tourments. On veut savoir la cause
    De chaque effet. Un mot, un geste, une ombre, un rien,
    La plus folle chimère, un souvenir ancien
    Qui dormait dans un coin du cœur et qui s’éveille,
    Tout vous effraie....

  • Je voudrais l’oublier, ou ne pas la connaître…
    Oh, si j’avais pensé que dans mon cœur dût naître
    Ce feu qui le dévore et qui ne s’éteint pas,
    Loin d’elle encore à temps j’aurais porté mes pas…
    Mais non, il le fallait ; c’était ma destinée !
    Contre elle vainement dans mon âme indignée
    Je crie et me révolte ; il le fallait. Le soir,
    À l’ombre des...

  • Si votre doux accueil n'eût consolé ma peine,
    Mon âme languissait, je n'avais plus de veine,
    Ma fureur était morte, et mes esprits couverts
    D'une tristesse sombre avaient quitté les vers.
    Ce métier est pénible, et notre sainte étude
    Ne connaît que mépris, ne sent qu'ingratitude :
    Qui de notre exercice aime le doux souci,
    Il hait sa renommée et sa...