• Le voyage fut ride, et le péril fut grand.
    Pourtant, après avoir, plus de deux mois durant,
    Vogué dans les hasards de l’immensité fauve,
    La petite flottille arriva saine et sauve
    Auprès de bords perdus sous d’étranges climats…
    — Terre ! cria la voix d’un mousse au haut des mâts.
    C’était le Canada mystérieux et sombre.
    Sol plein d’horreur tragique et...

  •  
    Un jour, errant, perdu dans un désert sans borne,
    Un pâle voyageur cheminait lentement ;
    Autour de lui dormait la solitude morne,
    Et le soleil brûlait au fond du firmament.

    Pas une goutte d’eau pour sa lèvre en détresse !
    Pas un ombrage frais ! pas un souffle de vent !
    Nulle herbe, nul gazon ; et la plaine traîtresse
    N’offre à son pied lassé...

  •  
    Ce sont deux frais séjours, deux vrais nids de fauvettes,
    Faits pour des heureux ;
    Deux villas comme seuls en rêvent les poëtes
    Et les amoureux.

    L’une est couleur de rose, et l’autre toute blanche ;
    Leurs toits sont couverts,
    Le printemps et l’été, comme d’une avalanche
    De grands rameaux verts.

    Sons le dais parfumé que leur font les...

  •  
    Sur un îlot désert de l’Ottawa sauvage,
    Le voyageur remarque, à deux pas du rivage,
    Un tertre que la ronce achève de couvrir :
    Un jour quelqu’un, ici, s’arrêta pour mourir.

    L’humble tombe des bois n’a ni grille ni marbre ;
    Mais, poëte naïf, à l’écorce d’un arbre
    Cet étrange mourant confia son regret,
    Jetant sa plainte amère au vent de la forêt...

  •  
    Salut ! Père-des-Eaux, fécond Meschacébé,
    Fleuve immense qui tiens tout un monde englobé
    Dans tes méandres gigantesques !
    Toi dont les flots sans fin, rapides ou dormants,
    A des bords tout peuplés de souvenirs charmants
    Chantent cent poëmes dantesques !

    Comme l’antique Hercule, ô colosse indompté,
    Tu t’en vas promenant ta fière majesté
    ...

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    Dix printemps n’avaient pas encore
    Fleuri sur son front pâle et doux ;
    De ses grands yeux fixés sur nous
    S’échappaient des rayons d’aurore.

    L’enfance avec tous ses parfums,
    Rayonnante comme un symbole,
    Enveloppait d’une auréole,
    Les ondes de ses cheveux bruns.

    Sa petite âme, à la lumière,
    Rose mystique, s’entr’ouvrait ;
    ...

  •  
    O soir charmant ! La nuit aux voix mystérieuses
    Nous caressait tous trois de ses molles clartés ;
    Et nous contemplions, moi rêveur, vous rieuses,
    De la lune et des flots les magiques beautés.

    Le steamer qu’emportait la roue au vol sonore,
    Eparpillait au loin, sur le fleuve écumeux,
    Des gerbes de lumière et des reflets d’aurore,
    Qui s’...

  •  
    C’était un lieu charmant, une roche isolée,
    Seule, perdue au loin dans la bruyère eu fleur ;
    La ronce y rougissait, et le merle siffleur
    Y jetait les éclats de sa note perlée.

    C’était un lieu charmant. Là, quand les feux du soir
    Empourpraient l’horizon d’une lueur mouvante,
    En écartant du pied la luzerne odorante,
    Tout rêveurs, elle et moi,...

  •  
    Moi, mes enfants, j’étais un patriote, un vrai !
    Je n’en disconviens pas ; et tant que je vivrai,
    L’on ne me verra point m’en vanter à confesse...
    Je sais bien qu’aujourd’hui maint des nôtres professe
    De trouver insensé ce que nous fîmes là.
    Point d’armes, point de chefs, c’est ceci, c’est cela ;
    On prétend que c’était faire d’un mal un pire
    ...

  •  
    Ô terre des aïeux ! ô sol de la patrie !
    Toi que mon cœur aimait avec idolâtrie,
    Me faudra-t-il mourir sans pouvoir te venger !
    Hélas ! oui ; pour l’exil, je pars, l’âme souffrante,
    Et, giaour errant, je vais planter ma tente
    Sous le soleil de l’étranger.

    Quand, du haut du vaisseau qui m’emportait loin d’elles,
    J’ai jeté mes regards sur tes...