• Pittoresque manoir, retraite hospitalière
    Où Papineau vaincu coula ses derniers jours,
    J'aime à revoir tes murs, ta terrasse, tes tours
    Secouant au soleil leur panache de lierre.

    Qui suit de tes sentiers la courbe irrégulière,
    En s'égarant sous bois, s'imagine toujours
    Voir, dans le calme ombreux de leurs secrets détours,
    Glisser du grand tribun l'...

  • L'eau qui se précipite en énorme volume,
    Heurtant l'angle des rocs sur leur base tremblants,
    Avec de longs cris sourds roule en tourbillons blancs
    C'est le fleuve qui prend sa course dans la brume.

    Comme un cheval fougueux dont on saigne les flancs,
    Il se cabre d'abord, puis court, bondit, écume,
    Et va dans le lointain cacher son flot qui fume,
    ...

  • Jours de deuil ! Plus de nids sous le feuillage vert ;
    Les chantres de l'été désertent nos bocages ;
    On n'entend que le cri de l'oiseau dans les cages,
    Avec les coups de bec sonores du pivert.

    De jaunissants débris le gazon s'est couvert ;
    Les grands boeufs tristement reviennent des pacages ;
    Et la sarcelle brune, au bord des marécages,
    Prend son...

  • La tempête a cessé. L'éther vif et limpide
    A jeté sur le fleuve un tapis d'argent clair,
    Où l'ardent patineur au jarret intrépide
    Glisse, un reflet de flamme à son soulier de fer.

    La promeneuse, loin de son boudoir tépide,
    Bravant sous les peaux d'ours les morsures de l'air,
    Au son des grelots d'or de son cheval rapide,
    À nos yeux éblouis passe comme...

  • Robuste, et largement appuyé sur sa base,
    Le colosse trapu s'avance au sein des flots ;
    Sur son flanc tout couvert de pins et de bouleaux
    Un nuage s'étend comme un voile de gaze.

    Sur son vaste sommet, de merveilleux tableaux
    Se déroulent devant le regard en extase ;
    Et vous suivez des yeux chaque voile qui rase,
    Dix-huit cents pieds sous vous, le...

  • C'est la fenaison ; personne ne chôme.
    Dès qu'on voit du jour poindre les blancheurs,
    En groupes épars, les rudes faucheurs
    Vont couper le foin au sauvage arome.

    Au bord des ruisseaux, d'indolents pêcheurs
    Des saules pensifs dorment sous le dôme ;
    Et, le soir venu, l'air qui nous embaume
    Apporte déjà d'étranges fraîcheurs.

    Mais, quand...

  • Dans l'essaim nébuleux des constellations,
    Ô toi qui naquis la première,
    Ô nourrice des fleurs et des fruits, ô Lumière,
    Blanche mère des visions,

    Tu nous viens du soleil à travers les doux voiles
    Des vapeurs flottantes dans l'air :
    La vie alors s'anime et, sous ton frisson clair,
    Sourit, ô fille des étoiles !

    Salut ! car avant toi les...

  • On entend l'Océan heurter les promontoires ;
    De lunaires clartés blêmissent le ravin
    Où l'homme perdu, seul, épars, se cherche en vain ;
    Le vent du nord, sonnant dans les frondaisons noires,
    Sur les choses sans forme épand l'effroi divin.

    Paisibles habitants aux lentes destinées,
    Les grands sapins, pleins d'ombre et d'agrestes senteurs,
    De leurs...

  • Sous les branches de saule en la vase baignées
    Un peuple impur se tait, glacé dans sa torpeur,
    Tandis qu'on voit sur l'eau de grêles araignées
    Fuir vers les nymphéas que voile une vapeur.

    Mais, planant sur ce monde où la vie apaisée
    Dort d'un sommeil sans joie et presque sans réveil,
    Des êtres qui ne sont que lumière et rosée
    Seuls agitent leur...

  • A Étienne Charavay.

    Cette relique exhale un parfum d'élégie,
    Car la reine d'Écosse, aux lèvres de carmin,
    Qui récitait Ronsard et le missel romain,
    Y mit en la touchant un peu de sa magie.

    La reine blonde, avec sa fragile énergie,
    Signa MARIE au bas de ce vieux parchemin,
    Et le feuillet heureux a tiédi sous la main
    Que bleuissait un...