Montebello

Pittoresque manoir, retraite hospitalière
Où Papineau vaincu coula ses derniers jours,
J'aime à revoir tes murs, ta terrasse, tes tours
Secouant au soleil leur panache de lierre.

Qui suit de tes sentiers la courbe irrégulière,
En s'égarant sous bois, s'imagine toujours
Voir, dans le calme ombreux de leurs secrets détours,
Glisser du grand tribun l'image familière.

Car il vit tout entier ici -dans chaque objet ;
Il aimait ce fauteuil, cet arbre l'ombrageait ;
Tout nous parle de lui, tout garde sa mémoire ;

Et, pour suprême attrait, sur ce seuil enchanté,
Le coeur tout grand ouvert, la Grâce et la Beauté
Ajoutent leur prestige aux souvenirs de gloire.

Collection: 
1874

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C'est la fenaison ; personne ne chôme.
Dès qu'on voit du jour poindre les blancheurs,
En groupes épars, les rudes faucheurs
Vont couper le foin au sauvage arome.

Au bord des ruisseaux, d'indolents pêcheurs
Des saules pensifs dorment sous le dôme ;
Et, le soir...

Robuste, et largement appuyé sur sa base,
Le colosse trapu s'avance au sein des flots ;
Sur son flanc tout couvert de pins et de bouleaux
Un nuage s'étend comme un voile de gaze.

Sur son vaste sommet, de merveilleux tableaux
Se déroulent devant le regard en extase...

La tempête a cessé. L'éther vif et limpide
A jeté sur le fleuve un tapis d'argent clair,
Où l'ardent patineur au jarret intrépide
Glisse, un reflet de flamme à son soulier de fer.

La promeneuse, loin de son boudoir tépide,
Bravant sous les peaux d'ours les morsures...

Jours de deuil ! Plus de nids sous le feuillage vert ;
Les chantres de l'été désertent nos bocages ;
On n'entend que le cri de l'oiseau dans les cages,
Avec les coups de bec sonores du pivert.

De jaunissants débris le gazon s'est couvert ;
Les grands boeufs...

L'eau qui se précipite en énorme volume,
Heurtant l'angle des rocs sur leur base tremblants,
Avec de longs cris sourds roule en tourbillons blancs
C'est le fleuve qui prend sa course dans la brume.

Comme un cheval fougueux dont on saigne les flancs,
Il se cabre d'...