• Misérables travaux, vagabonde pensée,
    Soucis continuels, espoirs faux et soudains,
    Feintes affections, véritables dédains,
    Mémoire qu'une absence a bientôt effacée,

    Vraie et parfaite amour d'oubli récompensée,
    Aventureux désirs, mais follement hautains,
    Et vous de ma douleur messagers trop certains,
    Soupirs, qui donnez air à mon âme oppressée,
    ...

  • Oh ! pour remplir de moi ta rêveuse pensée,
    Tandis que tu m'attends, par la marche lassée,
    Sous l'arbre au bord du lac, loin des yeux importuns,
    Tandis que sous tes pieds l'odorante vallée,
    Toute pleine de brume au soleil envolée,
    Fume comme un beau vase où brûlent des parfums ;

    Que tout ce que tu vois, les coteaux et les plaines,
    Les doux...

  • Quand le livre où s'endort chaque soir ma pensée,
    Quand l'air de la maison, les soucis du foyer,
    Quand le bourdonnement de la ville insensée
    Où toujours on entend quelque chose crier,

    Quand tous ces mille soins de misère ou de fête
    Qui remplissent nos jours, cercle aride et borné,
    Ont tenu trop longtemps, comme un joug sur ma tête,
    Le regard de mon âme...

  • Sonnez, sonnez toujours, clairons de la pensée.

    Quand Josué rêveur, la tête aux cieux dressée,
    Suivi des siens, marchait, et, prophète irrité,
    Sonnait de la trompette autour de la cité,
    Au premier tour qu'il fit, le roi se mit à rire ;
    Au second tour, riant toujours, il lui fit dire :
    " Crois-tu donc renverser ma ville avec du vent ? "
    À la troisième...

  • Quand le désir de ma haute pensée,
    Me fait voguer en mer de ta beauté,
    Espoir du fruit de ma grand' loyauté,
    Tient voile large à mon désir haussée.

    Mais cette voile ainsi en l'air dressée,
    Pour me conduire au port de privauté,
    Trouve en chemin un flot de cruauté,
    Duquel elle est rudement repoussée.

    Puis de mes yeux la larmoyante pluie...

  • Élégie

    Par mon amour et ma constance,
    J'avais cru fléchir ta rigueur,
    Et le souffle de l'espérance
    Avait pénétré dans mon coeur ;
    Mais le temps, qu'en vain je prolonge,
    M'a découvert la vérité,
    L'espérance a fui comme un songe...
    Et mon amour seul m'est resté !

    Il est resté comme un abîme
    Entre ma vie et le bonheur,
    Comme un...