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    Les lionceaux ont des asiles,
    Les oiseaux du ciel ont des nids :
    Les pauvres mères de nos villes
    N’ont point de toits pour leurs petits !

    Oh ! rouvrez-leur des bras de mère,
    Donnez-leur le lait et le pain,
    Et gardez de la graine amère
    Le van qui leur épand le grain !

    Et vous, venez, timide enfance ;
    Bénissez Dieu sur leurs genoux...

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    O philosophe, ô solitaire
    Sur la montagne retiré,
    Qui répands de là sur la terre
    La chaleur d’un cœur inspiré !

    Quand je m’assois dans ces retraites
    Pleines de générations,
    Où tu ranges sur deux tablettes
    La sagesse des nations,

    Dans ces catacombes des âges,
    En un volume reliés,
    Quand je vois dans deux ou trois pages
    ...

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    Tes vers jaillissent, les miens coulent :
    Dieu leur fit un lit différant ;
    Les miens dorment et les tiens roulent
    Je suis le lac, toi le torrent !

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    Ah ! béni soit celui dont l’amitié discrète
    Me prodigue ses vœux sans oser se nommer ;
    Et que ces vœux touchants qu’il adresse au poète
    Retombent sur son front, comme des fleurs qu’on jette
    Retombent pour nous embaumer.

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    Quand, assise le soir au bord de ta fenêtre,
    Devant un coin du ciel qui brille entre les toits,
    L’aiguille matinale a fatigué tes doigts,
    Et que ton front comprime une âme qui veut naître.
    Ta main laisse échapper le lin brodé de fleurs
    Qui doit parer le front d’heureuses fiancées,
    Et, de peur de tacher ses teintes nuancées,
    Tes beaux yeux...

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    Des cheveux ! mais ils sont blanchis sous les années !
    Des cheveux ! mais ils vont tomber sous les hivers !
    Que feraient tes beaux doigts de leurs boucles fanées ?
    Pour tresser la couronne, il faut des rameaux verts.

    Crois-tu donc, jeune fille aux jours d’ombre et de joie,
    Qu'un front d’homme chargé de quarante printemps
    Germe ces blonds anneaux et...

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    Souvent en respirant ces nocturnes haleines,
    Qui des monts éloignés descendent sur les plaines
    Ou des bords disparus sur les vagues des mers,
    On croit dans ces odeurs, que l’esprit décompose,
    Respirer le parfum des lis ou de la rose,
    Apporté de loin par les airs.

    L’imagination, cet œil de la pensée ,
    Se figure la tige aux rochers balancée,...

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    Amitié, doux repos de l’âme,
    Crépuscule charmant des cœurs.
    Pourquoi, dans les yeux d’une femme,
    As-tu de plus tendres langueurs ?

    Ta nature est pourtant la même ;
    Dans le cœur dont elle a fait don
    Ce n’est plus la femme qu’on aime,
    Et l’amour a perdu son nom.

    Mais comme en une pure glace
    Le rayon se colore mieux,
    Le...

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    Quand le printemps a mûri l’herbe
    Qui porte la vie et le pain,
    Le moissonneur liant la gerbe
    L’emporte à l’aire du bon grain ;
    Il ne regarde pas si l’herbe qu’il enlève
    Verdit encore au pied de jeunesse et de sève,
    Ou si, sous les épis courbés en pavillon,
    Quelques frêles oiseaux, à qui l’ombre était douce,
    Du soleil ou du vent s’...

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    Je suis seul dans la prairie
    Assis au bord du ruisseau ;
    Déjà la feuille flétrie,
    Qu’un flot paresseux charrie,
    Jaunit l'écume de l’eau.

    La respiration douce
    Des bois au milieu du jour
    Donne une lente secousse
    A la vague, au brin de mousse,
    Au feuillage d’alentour.

    Seul et la cime bercée,
    Un jeune et haut peuplier...