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    Ah ! Quel que soit le deuil jeté sur cette terre
    Qui par deux fois du monde a changé le destin,
    Quels que soient ses malheurs et sa longue misère,
    On ne peut la quitter sans peine et sans chagrin.

    Ainsi, près de sortir du céleste jardin,
    Je me retourne encor sur les cimes hautaines,
    Pour contempler de là son horizon divin
    Et longtemps m’...

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    Si dans mon cœur chrétien l’antique foi s’altère,
    L’art reste encor debout, comme un marbre pieux
    Que le soleil, tombé de la voûte des cieux,
    Colore dans la nuit d’un reflet solitaire.

    Ainsi, vieil Allegri, musicien austère,
    Compositeur sacré des temps religieux,
    Ton archet bien souvent me ramène aux saints lieux,
    Adorer les pieds morts du...

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    Hélas ! Qui le croirait ? Ce fantôme hideux,
    Ce monstre à l’œil éteint dans son orbite creux,
    Au crâne sans cheveux et souillé de poussière,
    Aux membres allongés et froids comme la pierre,
    A la teinte jaunâtre, à cette fade odeur
    Qui vous met malgré vous le trouble dans le cœur ;
    Tout ce je ne sais quoi qui n’est plus de la vie,
    Que ne peut...

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    Arlequin.
    Toujours triste, toujours soucieux, cher Pierrot,
    Et toujours mécontent du monde comme un sot !
    C’est un tort, un grand tort : il faut fuir la tristesse
    Et faire de chaque heure une charmante ivresse.

    Pierrot.
    Dans mes pensers je suis la constance elle-même ;
    Vois mon gilet, mes bas et ma figure blême !
    Je suis blanc, toujours...

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    Ah ! La mer est terrible au fort de la tempête,
    Lorsque levant aux cieux sa vaste et lourde tête,
    Elle retombe et jette aux peuples consternés
    Des cadavres humains sur des mâts goudronnés ;
    L’incendie est terrible autant et plus encore,
    Quand de sa gueule en flamme il étreint et dévore
    Comme troupeaux hurlants les immenses cités.
    Mais ni le feu...

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    Le jour où j’ai quitté le sol de mes aïeux,
    La verdoyante Érin et ses belles collines,
    Ah ! Pour moi ce jour-là fut un jour malheureux.
    Là, les vents embaumés inondent les poitrines ;
    Tout est si beau, si doux, les sentiers, les ruisseaux,
    Les eaux que les rochers distillent aux prairies,
    Et la rosée en perle attachée aux rameaux !
    Ô terre de...

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    Dans la noble Venise autrefois l’on raconte
    Qu’un riche gentilhomme, un sénateur, un comte,
    Eut pour fille un enfant qu’on appelait Bianca :
    Dans Venise voici ce qui lors arriva.
    Ainsi que toute fille et toute italienne,
    Paresseuse à ravir, notre vénitienne,
    Blanche comme une étoile, et comme faite au tour,
    Au balcon du palais demeurait tout le...

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    Un matin, dégoûté de la rime indocile,
    Dans un coin populeux de notre grande ville
    J’errais, quand tout à coup s’élève une rumeur.
    Un homme s’enfuyait en criant : au voleur !
    Et désignait du doigt la route présumable
    Que dans son vif élan avait pris le coupable.
    Et chacun de bondir vers l’endroit qu’il montrait :
    Mais lui par un détour à l’...

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    Ô désolation, ô misère profonde !
    Désespoir éternel pour les âmes du monde !
    Sol de Jérusalem, que tant d’hommes pieux
    Ont baigné de sueur et des pleurs de leurs yeux ;
    Sainte terre enlevée aux monts de la Judée,
    Et du sang des martyrs encor tout inondée ;
    Sainte terre des morts qui portas le sauveur,
    Toi, que tout front chrétien baisait avec...

  • C’était l’heure où la terre appartient au soleil,
    Où les chemins poudreux luisent d’un ton vermeil,
    Où rien n’est confondu dans l’aride campagne,
    Où l’on voit les troupeaux couchés sur la montagne,
    Et le pâtre bruni, dans les plis d’un manteau,
    Dormir nonchalamment près d’un rouge tombeau ;
    L’heure aux grands horizons, l’heure où l’ombre est mortelle
    ...