Mon vieux compatriote, on t’oublie. On déterre,
Chaque jour, dans le fond de quelque monastère,
Un rimeur enfoui sous l’herbe & les plâtras ;
On ressoude ses vers mutilés par les rats,
On leur remet des pieds ; on les commente, on glose ;
Un savant les encadre au milieu de sa prose ;
Puis, un matin, Jehan Tournebrousche renaît !
On en parle, on le...
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Cosette ! le printemps nous appelle. Fuyons
La chambre longtemps close & les murailles sombres,
Allons dans la campagne où, dissipant les ombres,
Tombe la pluie ardente & folle des rayons.Tristesses de l’hiver, allez-vous-en ! Rions
Puisque avril nous revient, & que dans les décombres
Fleurit la giroflée, & que toutes pénombres
S’... -
Rien n’est plus ennuyeux que ces villes banales
Débitant le soleil à faux poids, ou des eaux
Qui doivent aciérer nos muscles & nos os,
Pays d’albums usés, stations hivernales.Des princes vagabonds illustrent leurs annales ;
Les hôteliers hargneux combinent des réseaux,
Et l’on voit fuir au loin la joie & les oiseaux
Devant de laids bourgeois... -
Même éprouvée ainsi que je te vois, ô France !
Dans ces temps douloureux où tes plus jeunes fils
Vont mourir pour ta délivrance,
Et lancent aux échos les suprêmes défis ;Avec tes champs brûlés, tes forêts sépulcrales
Où reviennent, le soir, des fantômes sanglants,
Avec tes hameaux pleins de râles,
Que lèche l’incendie aux... -
À Leconte de Lisle.I
Cypris au sein neigeux était née, et les flots
Qui se pâment avec d’ineffables sanglots
Sous le regard ami des étoiles flottantes,
Adoraient de ses pieds les blancheurs éclatantes.
Pensive, elle rêvait sur son berceau houleux ;
L’azur était resté fixé dans ses yeux bleus,
L’écume rougissait près d’... -
O France claire et gaie, amante au fier visage !
Toi qu’enivre, au milieu d’un riant paysage,
La chanson de Ronsard et de Victor Hugo,
Toi qui jettes aux cœurs un charmant quos ego !
Belle fille qui fuis, moqueuse, vers les saules,
Regarde… un tas de gueux, d’épouvantables drôles,
Taillés à coups de serpe, et s’échappant du bois
... -
Ô sombre hiver ! Nuit de l’année,
Viens ! Ne garde plus enchaînée
La tempête désordonnée.Accours des quatre points des cieux ;
Laisse l’ouragan furieux
Briser les chênes soucieux.Âpre bise, ouragan sonore,
Accourez tous, je vous implore
Comme le soleil et l’aurore !Que le champ, ce divin aïeul,
Disparaisse sous un... -
Est-ce vous que j’aimai la première, Lucile,
Lorsque j’eus mes quinze ans ? est-ce vous, indocile
Écolière, toujours courant par les buissons ?
Ne serait-ce point vous, Laurette ? Vos chansons
Étaient d’un rossignol qui chante sous la nue,
Et nous admirions tous votre grâce ingénue.
Mais Suzanne était blonde, et Suzanne pouvait
Dire aux pêches... -
« Accourez tous !… battez la caisse !… le spectacle,
Si la mauvaise humeur du temps n’y met obstacle,
Sera fort curieux. Depuis Rome, cela
Ne s’était jamais vu !… c’est un royal gala !
César de Prusse, ainsi que les césars antiques,Traînant après son char, avec leurs sciatiques,
Leur honte sur le front, et leurs maux inconnus
Comme la... -
À Albéric Second.Dimanche : le soleil, dont les pâles rayons
Nous font renaître encor lorsque nous les voyons,
Luit dans le brouillard froid et gris ; les cheminées
Se dressent sur les toits, noires, chaperonnées
De tôle ; sur la place, écoutant les accords
D’un orchestre guerrier, leurs beaux habits dehors,
Mille bourgeois...