• Seule, en un coin de terre où plane la tristesse
    Et le mélancolique et vague ennui des soirs,
    La vieille maison blanche, aux grands contrevents noirs,
    Pleure-t-elle ses gens, son hôte, son hôtesse ?

    Avec sa porte close et ses carreaux en deuil
    Qui ne semblent, au loin, qu'un vaporeux décalque,
    La maison blanche et noire a l'air d'un catafalque
    ...

  • J'aime la solitude et me rends solitaire
    Pour penser librement à mes belles amours,
    Je cherche les forêts et les lieux les plus sourds
    Pour leur dire les maux qu'aux mortels je veux taire.

    Ils servent à mon deuil de loyal secrétaire,
    Recevant les soupirs que je pousse toujours ;
    C'est le trésor caché des regrets de mes jours,
    L'air en est le...

  • Va, mon âme, au-dessus de la foule qui passe,
    Ainsi qu'un libre oiseau te baigner dans l'espace.
    Va voir ! et ne reviens qu'après avoir touché
    Le rêve... mon beau rêve à la terre caché.

    Moi, je veux du silence, il y va de ma vie ;
    Et je m'enferme où rien, plus rien ne m'a suivie ;
    Et de son nid étroit d'où nul sanglot ne sort,
    J'entends courir le siècle...

  • Ce soir je reprendrai mon chemin solitaire,
    Dans les champs où la nuit traîne son manteau bleu
    J'irai, respirant l'air que l'herbe en fleur embaume,
    Triste et pressant le pas comme ceux qui vont seuls ;
    Je verrai les hameaux s'endormir sous le chaume,
    Et les amants tresser leurs doigts sous les tilleuls,
    Et les femmes filer encore, et les aïeuls
    Rêver...

  • Aie une âme hautaine et sonore et subtile,
    Tais-toi, mure ton seuil, car la lutte déprave ;
    Forge en sceptre l'or lourd et roux de tes entraves,
    Ferme ton coeur à la rumeur soûle des villes ;

    Entends parmi le son des flûtes puériles
    Se rapprocher le pas profond des choses graves ;
    Hors la cité des rois repus, tueurs d'esclaves,
    Sache une île...

  • Je suis tel qu'un ponton sans vergues et sans mâts,
    Aventureux débris des trombes tropicales,
    Et qui flotte, roulant des lingots dans ses cales,
    Sur une mer sans borne et sous de froids climats.

    Les vents sifflaient jadis dans ses raille poulies.
    Vaisseau désemparé qui ne gouverne plus,
    Il roule, vain jouet du flux et du reflux,
    L'ancien explorateur des...

  • Sommeil, paisible fils de la Nuit solitaire,
    Père alme, nourricier de tous les animaux,
    Enchanteur gracieux, doux oubli de nos maux,
    Et des esprits blessés l'appareil salutaire :

    Dieu favorable à tous, pourquoi m'es-tu contraire ?
    Pourquoi suis-je tout seul rechargé de travaux,
    Or que l'humide nuit guide ses noirs chevaux,
    Et que chacun jouit de ta...

  • Solitaire et pensif, dans un bois écarté,
    Bien loin du populaire et de la tourbe épaisse,
    Je veux bâtir un temple à ma fière déesse,
    Pour apprendre mes voeux à sa divinité.

    Là, de jour et de nuit, par moi sera chanté
    Le pouvoir de ses yeux, sa gloire et sa hautesse,
    Et, dévot, son beau nom j'invoquerai sans cesse,
    Quand je serai pressé de quelque...

  • Je vis cloîtré dans mon âme profonde,
    Sans rien d'humain, sans amour, sans amis,
    Seul comme un dieu, n'ayant d'égaux au monde
    Que mes aïeux sous la tombe endormis !
    Hélas ! grandeur veut dire solitude.
    Comme une idole au geste surhumain,
    Je reste là, gardant mon attitude,
    La pourpre au dos, le monde dans la main.

    Comme Jésus, j'ai le cercle d...

  • Je m'étoy retiré du peuple, et solitaire
    Je tachoy tous les jours de jouir sainctement
    Des celestes vertus, que jadis justement
    Jupiter retira des yeux du populaire.

    Ja les unes venoyent devers moy se retraire,
    Les autres j'appelloy de moment en moment
    Quand l'amour traistre helas! (las trop fatalement)
    Ce fut, ô ma Pandore, en mall'heure me plaire :...