Novembre a mis, comme un suaire,
Sa longue robe de brouillards ;
Le soleil, dans nos cieux blafards,
Semble une lampe mortuaire.

Les feuilles pendent en haillons
Au noir squelette de la vigne,
Et, là-bas, fument des sillons
Près de ces tombeaux...

 
Les Morts ne dorment pas couchés sous la poussière,
Leur cendre ne gît point dans les urnes d’airain,
Le cortège des Morts se déroule sur terre,
C’est la procession des calmes pèlerins.

Les Morts viennent à nous quand le deuil nous accable,
Frôlant de leurs...

 
Heureux qui vit sans se connaître
Indéfiniment établi
Dans la paix de son propre oubli,
À la surface de son être !

Car les clairvoyants du destin
Vivent la mort lente et soufferte,
Sentant partout la tombe ouverte
Au bord de leur pas incertain...

VIII

Ils gisent dans le champ terrible et solitaire.
Leur sang fait une mare affreuse sur la terre ;
Les vautours monstrueux fouillent leur ventre ouvert ;
Leurs corps farouches, froids, épars sur le pré vert,
Effroyables, tordus, noirs...

Poet: Victor Hugo

Berger du monde, clos les paupières funèbres
Des deux chiens d’Yama qui hantent les ténèbres.

Va, pars ! Suis le chemin antique des aïeux.
Ouvre sa...

 
I

LE VER.
Le soir est triste et froid. La lune solitaire
Donne comme à regret ses rayons à la terre ;
Le vent de la forêt jette un cri déchirant ;
Le flot du Saint-Laurent semble une voix qui pleure,
Et la cloche d'airain fait vibrer d'heure en heure...


...

 
On scrute leur portrait, espérant qu’il en sorte
Un cri qui puisse enfin nous servir de flambeau.
Ah ! si même ils venaient pleurer à notre porte
Lorsque le soir étend ses ailes de corbeau !

Non ! Mieux que le linceul, la bière et le tombeau
Le silence...

 
Novembre aux cheveux gris s’est drapé dans sa brume ;
Il répand ses vapeurs sur le sillon qui fume,
Et, de ses fils d’argent croisés sur le gazon,
Tresse un premier linceul à la belle saison.
Près des bois, dépouillés comme un sombre ossuaire,
On pressent...

 
De ses grands yeux chastes et fous
Il ne reste pas un vestige :
Ces yeux qui donnaient le vertige
Sont allés où nous irons tous.

En vain, ils étaient frais et doux
Comme deux bluets sur leur tige ;
De ses grands yeux chastes et fous
Il ne reste...