Sérénade au milieu d’une fête

 

QUE s’éteignent les gaîtés,
Que cesse le rire !
― C’est la musique. Écoutez !
Comme dit Shakespeare.

Sous le ciel nocturne, allons,
Pour la mieux entendre.
Pianissimo, violons !
Jouez un air tendre.

Un voyage au pays bleu,
Je vous en supplie !
Un peu de mystère ! Un peu
De mélancolie !

Au bras de votre servant,
Femmes, sous vos voiles,
Comparez, en les levant,
Vos yeux aux étoiles.

Écoutez, cœurs ingénus,
La chanson touchante
Que pour les astres émus
Le rossignol chante.

Respirons l’odeur du foin,
Le parfum des roses.
Salut, fleurs du ciel de juin
Largement écloses !

Que vers votre pur éclat
Notre esprit s’élève !
Nul plaisir n’est délicat
Sans un peu de rêve.

Collection: 
1862

More from Poet

  • O poète trop prompt à te laisser charmer,
    Si cette douce enfant devait t'être ravie,
    Et si ce coeur en qui tout le tien se confie
    Ne pouvait pas pour toi frémir et s'animer ?

    N'importe ! ses yeux seuls ont su faire germer
    Dans mon âme si lasse et de tout assouvie...

  • J'écris près de la lampe. Il fait bon. Rien ne bouge.
    Toute petite, en noir, dans le grand fauteuil rouge,
    Tranquille auprès du feu, ma vieille mère est là ;
    Elle songe sans doute au mal qui m'exila
    Loin d'elle, l'autre hiver, mais sans trop d'épouvante,
    Car je suis...

  • Champêtres et lointains quartiers, je vous préfère
    Sans doute par les nuits d'été, quand l'atmosphère
    S'emplit de l'odeur forte et tiède des jardins ;
    Mais j'aime aussi vos bals en plein vent d'où, soudains,
    S'échappent les éclats de rire à pleine bouche,
    Les polkas...

  • Songes-tu parfois, bien-aimée,
    Assise près du foyer clair,
    Lorsque sous la porte fermée
    Gémit la bise de l'hiver,

    Qu'après cette automne clémente,
    Les oiseaux, cher peuple étourdi,
    Trop tard, par un jour de tourmente,
    Ont pris leur vol vers le Midi ;...

  • Captif de l'hiver dans ma chambre
    Et las de tant d'espoirs menteurs,
    Je vois dans un ciel de novembre,
    Partir les derniers migrateurs.

    Ils souffrent bien sous cette pluie ;
    Mais, au pays ensoleillé,
    Je songe qu'un rayon essuie
    Et réchauffe l'oiseau...