La nuit est froide et l’aube âpre, givreuse et dure.
Mais déjà la surelle emplit le talus vert
Et sur le grand bois gris qu’abandonne l’hiver
Flotte comme une écume immense de verdure.
L’ossature géante et compacte des hêtres
Se crispe, nue encore, et se raidit là-haut,
Tandis que le feuillage aminci du bouleau
Chante au long de l’orée où les troupeaux vont paître.
Tous les oiseaux sont revenus : les hochequeues,
Les mésanges, les loriots, les rossignols
Glissent dans les taillis et frôlent de leur vol
La jaune parisette et la jacinthe bleue.
De fleur en fleur, à ras du sol, même sous terre,
Sous les mousses, dans les souches, au fond des trous,
Mouches noires, abeilles d’or et bourdons roux
Enchevêtrent leur vie ample et myriadaire.
Et toutes ces rumeurs et tous ces cris qui passent
Et se gonflent et s’apaisent quand vient la nuit,
Déplient comme un tissu multiforme de bruit
Que le jeu des vents clairs jette aux bras de l’espace.