Pour l’hiver

      Vous dont le pinceau téméraire
Représente l’hiver sous l’image vulgaire
      D’un vieillard faible et languissant,
Peintres injurieux, redoutez la colère
      De ce dieu terrible et puissant :
      Sa vengeance est inexorable,
Son pouvoir jusqu’aux cieux sait porter la terreur ;
Les efforts des Titans n’ont rien de comparable
      Au moindre effet de sa fureur.

      Plus fort que le fils d’Alcmène,
      II met les fleuves aux fers ;
      Le seul vent de son haleine
      Fait trembler tout l’univers.

      Il déchaîne sur la terre
      Les aquilons furieux :
      Il arrête le tonnerre
      Dans la main du roi des dieux.

      Plus fort que le fils d’Alcmène,
      Il met les fleuves aux fers ;
      Le seul vent de son haleine
      Fait trembler tout l’univers.

      Mais si sa force est redoutable,
      Sa joie est encor plus aimable :
      C’est le père des doux loisirs ;
Il réunit les cœurs, il bannit les soupirs,
II invite aux festins, il anime la scène :
Les plus belles saisons sont des saisons de peine ;
      La sienne est celle des plaisirs.
Flore peut se vanter des fleurs qu’elle nous donne ;
      Cérès, des biens qu’elle produit ;
Bacchus peut s’applaudir des trésors de l’automne :
Mais l’hiver, l’hiver seul en recueille le fruit.

      Les dieux du ciel et de l’onde,
      Le soleil, la terre, et l’air,
      Tout travaille dans le monde
      Au triomphe de l’hiver.

      C’est son pouvoir qui rassemble
      Bacchus, l’Amour et les Jeux :
      Ces dieux ne régnent ensemble
      Que quand il règne avec eux.

      Les dieux du ciel et de l’onde,
      Le soleil, la terre et l’air,
      Tout travaille dans le monde
      Au triomphe de l’hiver.

Collection: 
1690

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