Paul Valéry

  • Tes pas, enfants de mon silence,
    Saintement, lentement placés,
    Vers le lit de ma vigilance
    Procèdent muets et glacés.

    Personne pure, ombre divine,
    Qu’ils sont doux, tes pas retenus !
    Dieux !... tous les dons que je devine
    Viennent à...

  • De sa grâce redoutable
    Voilant à peine l’éclat,
    Un ange met sur ma table
    Le pain tendre, le lait plat ;
    Il me fait de la paupière
    Le signe d’une prière
    Qui parle à ma vision :
    — Calme, calme, reste calme !
    Connais le poids d’une...

  • ... Je compose en esprit, sous les myrtes, Orphée
    L’Admirable !... le feu, des cirques purs descend ;
    Il change le mont chauve en auguste trophée
    D’où s’exhale d’un dieu l’acte retentissant.

    Si le dieu chante, il rompt le site tout-puissant ;
    Le...

  • CHUTE superbe, fin si douce,
    Oubli des luttes, quel délice
    Que d’étendre à même la mousse
    Après la danse, le corps lisse !

    Jamais une telle lueur
    Que ces étincelles d’été
    Sur un front semé de sueur
    N’avait la victoire fêté !

    ...

  • Ô frères ! tristes lys, je languis de beauté
    Pour m’ètre désiré dans votre nudité,
    Et vers vous, Nymphe, Nymphe, ô Nymphe des fontaines,
    Je viens au pur silence offrir mes lames vaines.

    Un grand calme m’écoute, où j’écoute l’espoir.
    La voix des...

  • De sa profonde mère, encor froide et fumante,
    Voici qu’au seuil battu de tempêtes, la chair
    Amèrement vomie au soleil par la mer,
    Se délivre des diamants de la tourmente.

    Son sourire se forme, et suit sur ses bras blancs
    Qu’éplore l’orient d’une...

  • La lune mince verse une lueur sacrée,
    Comme une jupe d’un tissu d’argent léger,
    Sur les masses de marbre où marche et croit songer
    Quelque vierge de perle et de gaze nacrée.

    Pour les cygnes soyeux qui frôlent les roseaux
    De carènes de plume à...

  • Une esclave aux longs yeux chargés de molles chaînes
    Change l’eau de mes fleurs, plonge aux glaces prochaines,
    Au lit mystérieux prodigue ses doigts purs ;
    Elle met une femme au milieu de ces murs
    Qui, dans ma rêverie errant avec décence,
    Passe...

  • Ô courbes, méandre,
    Secrets du menteur,
    Est-il art plus tendre
    Que cette lenteur ?

    Je sais où je vais,
    Je t’y veux conduire,
    Mon dessein mauvais
    N’est pas de te nuire...

    Quoique souriante
    En pleine fierté,
    Tant de...

  • Azur ! c’est moi… Je viens des grottes de la mort
    Entendre l’onde se rompre aux degrés sonores,
    Et je revois les galères dans les aurores
    Ressusciter de l’ombre au fil des rames d’or.

    Mes solitaires mains appellent les monarques
    Dont la barbe de...