Mon âme languissait, et d'une longue haleine

Mon âme languissait, et d'une longue haleine,
Par mes tristes soupirs, j'allégeais en ma peine
Mon éternel regret, et logeais en mes os
Les soucis importuns qui m'ôtaient le repos.
Tout m'était déplaisant et ma gêne cruelle
Me pressait sous l'horreur de sa force mortelle,
Tandis que loin de vous, je n'ai eu en mon coeur
Que peine, que souci, que travail, que malheur.
Tout m'était déplaisant, et durant mon dommage,
Je ne couvais que peur et perte en mon courage,
Car une froide crainte épandue dans moi
Compagne de l'amour redouble mon émoi,
Et tâchant d'arracher l'espérance meilleure
Qui plantée en mon sang, garde que je ne meure.
Las ! tout m'était fâcheux, la clarté du soleil
Nuisait par votre absence au cristal de mon oeil,
Et des obscures nuits l'horreur épouvantable
Martyrait encor plus mon esprit misérable.
Les moments m'étaient ans, et en mon triste sort,
Je n'avais devant moi que l'effroi de la mort ;
Et combien que le temps de ma peine fâcheuse
N'ait longuement pressé ma vie langoureuse,
Si n'ai-je pas laissé d'être cruellement
Travaillé en mon coeur de mal et de tourment,
Car les mois ni les ans ne sont par la mesure
Des effets de l'esprit qui n'est de leur nature.
Il mesure ses maux et ses contentements
Non par âges tournants, par siècles ou moments,
Mais selon la douleur de son cruel martyre,
Ou selon la douceur d'un bonheur qu'il désire.

Collection: 
1591

More from Poet

Faut-il qu'incessamment passionné je traîne
Les rigoureux liens de l'amour qui me gêne,
Et que sans espérer de me voir en repos
Je loge le souci pour toujours en mes os,
Que lamentant en vain mon malheur je soupire,
Sans pouvoir m'alléger en mon cruel martyre,...

Mon âme languissait, et d'une longue haleine,
Par mes tristes soupirs, j'allégeais en ma peine
Mon éternel regret, et logeais en mes os
Les soucis importuns qui m'ôtaient le repos.
Tout m'était déplaisant et ma gêne cruelle
Me pressait sous l'horreur de sa force...

Voulez-vous voir mon coeur, ouvrez-moi la poitrine,
Vous y verrez les traits de vos rares beautés,
Vous verrez en mon sang mille diversités
Émues par l'amour qui par vous y domine.

Vous y verrez l'ardeur de ma flamme divine,
Vous verrez tout au près mes poumons...

Quand vous considérez en cette claire glace
De vos perfections les belles raretés,
Non, vous n'y voyez point cette parfaite grâce
Que tout oeil reconnaît aux traits de vos beautés.

De quoi vous peut servir de savoir être belle ?
C'est cela que sans plus vous montre...

Un jour reconnaissant que je suis incapable,
Belle, de vous servir, j'en vins au désespoir,
Et prenant le chemin du désert effroyable,
Je voulus m'y cacher pour jamais ne rien voir.

C'est bien avoir des yeux de voir ce qui s'adresse,
Et de le discerner. Mais voir...