à quoi bon ?
Oh ! dans ces tristes temps de luttes intestines,
Quand le doute et la honte accablent le plus fort,
Quand rien nâest vrai sur rien, quand tout tombe en ruines,
Frappé de vertige ou de mort ;
Quand les Rois éperdus chancellent sur leurs trônes,
Quand le Prêtre sous lui sent la chaire trembler,
Quand le Riche à genoux embrasse les colonnes
De son palais prêt à crouler ;
Quand partout lâAnarchie écrase en sa colère
Le germe à peine éclos dâun plus noble avenir ;
Quâil ne reste plus rien à bénir sur la terre,
Plus rien dans les cieux à bénir ;
Que ne puis-je emporter au fond des solitudes,.
Loin du bruit des cités qui me poursuit toujours,
Mes austères loisirs et mes douces études,
Trop souvent troublés dans leur cours ;
Troublés par les clameurs dâun peuple de sauvages
Qui traîne, tour à tour, aux bords des grands chemins,
Les bustes mutilés et tout chargés dâoutrages
Et des Brutus et des Tarquins ;
Troublés par les sanglots et les cris dâanathème
Qui, du nord au midi, se heurtent dans les airs,
Et qui feraient dâeffroi pâlir Satan lui-même,
Sâils pénétraient jusquâaux enfers ;
Et trouver un paisible et verdoyant asile
Entouré par des monts couronnés de grands bois,
Qui se réfléchiraient dans une onde tranquille
Avec leurs châteaux dâautrefois,
Et prêteraient, lâété, la fraîcheur de leur ombre
Et lâodorant velours de leurs sentiers fleuris,
Aux radieux ébats de mes rêves sans nombre,
Tantôt solennels et hardis,
Se posant au sommet dâun monde qui sâécroule
Pour méditer la loi dâun immuable sort,
Ou planant sur des flots soulevés par la houle
Pour guider un navire au port ;
Tantôt, vifs et légers, suivant le météore
Ãclos dans les vallons sous lâhaleine du soir,
Ou suspendant leur vol à la gaze du store
Quâentrouvre une main douce à voir ;
Souvent dans lâavenir plongeant un Åil avide,
Et, sous ses voiles noirs, cherchant un astre dâor ,
Ou fouillant du Passé le sépulcre splendide
Pour en exhumer un trésor,
Et toujours rapportant de leur course infinie,
Sur les traits de la foudre ou sur lâaile des vents,
Quelque grande pensée étroitement unie,
Hélas ! à des vÅux décevants !