Vous que j’ai tant aimé, ô vous dont l’œil m’évite,
Si le hasard encor me plaçait sur vos pas,
Tremblante, à mes regards ne fuyez pas si vite,
De moi ne vous détournez pas.
Ne vous détournez pas ! Dans sa noble innocence,
Mon cœur s’étonne et souffre au trouble où je vous voi.
Si d’un trop haut amour la femme un jour s’offense,
Je l’ignorais ; pardonnez-moi.
Ne vous détournez pas ! Votre trouble me blesse.
Un souvenir, des fleurs ne vous sauraient lier !
Croyez à mon orgueil autant qu’à ma faiblesse :
J’aimai... mais je veux oublier.
Nul remords entre nous, nul secret, nul mystère !
De ma douleur jamais vous n’aurez à souffrir.
Celui qui si longtemps sut aimer et se taire,
Se taira, — dût-il en mourir !
L’amour a ses bonheurs ; hélas ! je les ignore.
L’amour a ses tourments ; je les ai trop connus.
Mais, je le sens au mal poignant qui me dévore,
Bientôt je ne souffrirai plus.
Que de jours, l’âme en proie à la mélancolie,
Me rappelant combien le sort te fut amer,
O Tasse ! ainsi que toi j’enchaînai ma folie
Dans un silence ardent et fier.
Est-ce ma faute à moi, dans une heure d’ivresse,
Si, vos regards troublant ma frêle volonté,
Votre main dans ma main, défaillant de tendresse,
Mon cœur sur ma lèvre est monté ?
Oubliez-le, ce mot, l’énigme de ma vie.
Votre instinct curieux, ô femme ! est satisfait.
A mon tour j’oublierai, chère et mortelle amie,
Le mal qui par vous me fut fait.
Allez en paix ! vivez ! Le monde vous réclame.
En riant foulez-y mon idéal cherché.
Oh ! vous saurez un jour, au vide de votre âme,
Sur quel cœur vous avez marché.