C’est toi, divin Bacchus, dont je chante la gloire :
Nymphes, faites silence, écoutez mes concerts.
Qu’un autre apprenne à l’univers
Du fier vainqueur d’Hector la glorieuse histoire ;
Qu’il ressuscite, dans ses vers,
Des enfants de Pélops l’odieuse mémoire :
Puissant dieu des raisins, digne objet de nos vœux,
C’est à toi seul que je me livre ;
De pampres, de festons, couronnant mes cheveux,
En tous lieux je prétends te suivre ;
C’est pour toi seul que je veux vivre
Parmi les festins et les jeux.
Des dons les plus rares
Tu combles les cieux ;
C’est toi qui prépares
Le nectar des dieux.
La céleste troupe,
Dans ce jus vanté,
Boit à pleine coupe
L’immortalité.
Tu prêtes des armes
Au dieu des combats ;
Vénus sans tes charmes
Perdrait ses appas.
Du fier Polyphème
Tu domptes les sens ;
Et Phébus lui-même
Te doit ses accents.
Mais quels transports involontaires
Saisissent tout à coup mon esprit agité ?
Sur quel vallon sacré, dans quels bois solitaires
Suis-je en ce moment transporté ?
Bacchus à mes regards dévoile ses mystères.
Un mouvement confus de joie et de terreur
M’échauffe d’une sainte audace ;
Et les Ménades en fureur
N’ont rien vu de pareil dans les antres de Thrace.
Descendez, mère d’Amour ;
Venez embellir la fête
Du dieu qui fit la conquête
Des climats où naît le jour.
Descendez, mère d’Amour ;
Mars trop longtemps vous arrête.
Déjà le jeune Sylvain,
Ivre d’amour et de vin,
Poursuit Doris dans la plaine ;
Et les Nymphes des forêts,
D’un jus pétillant et frais
Arrosent le vieux Silène.
Descendez, mère d’Amour;
Venez embellir la fête
Du dieu qui fit la conquête
Des climats où naît le jour,
Descendez, mère d’Amour ;
Mars trop longtemps vous arrête.
Profanes, fuyez de ces lieux !
Je cède aux mouvements que ce grand jour m’inspire.
Fidèles sectateurs du plus charmant des dieux,
Ordonnez le festin, apportez-moi ma lyre :
Célébrons entre nous un jour si glorieux.
Mais, parmi les transports d’un aimable délire,
Éloignons loin d’ici ces bruits séditieux
Qu’une aveugle vapeur attire :
Laissons aux Scythes inhumains
Mêler dans leurs banquets le meurtre et le carnage :
Les dards du Centaure sauvage
Ne doivent point souiller nos innocentes mains.
Bannissons l’affreuse Bellone
De l’innocence des repas :
Les Satyres, Bacchus, et Faune,
Détestent l’horreur des combats.
Malheur aux mortels sanguinaires,
Qui, par de tragiques forfaits,
Ensanglantent les doux mystères
D’un dieu qui préside à la paix !
Bannissons l’affreuse Bellone
De l’innocence des repas :
Les Satyres, Bacchus et Faune,
Détestent l’horreur des combats.
Veut-on que je fasse la guerre ?
Suivez-moi, mes amis; accourez, combattez.
Remplissons cette coupe, entourons-nous de lierre.
Bacchantes, prêtez-moi vos thyrses redoutés.
Que d’athlètes soumis ! que de rivaux par terre !
Ô fils de Jupiter, nous ressentons enfin
Ton assistance souveraine :
Je ne vois que buveurs étendus sur l’arène,
Qui nagent dans des flots de vin.
Triomphe ! victoire!
Honneur à Bacchus !
Publions sa gloire.
Triomphe ! victoire !
Buvons aux vaincus.
Bruyante trompette,
Secondez nos voix,
Sonnez leur défaite :
Bruyante trompette,
Chantez nos exploits.
Triomphe ! victoire!
Honneur à Bacchus !
Publions sa gloire.
Triomphe ! victoire !
Buvons aux vaincus.