Le dieu Mars et Vénus, blessés des mêmes traits,
Goûtaient les biens les plus parfaits,
Qu’aux cœurs bien enflammés le tendre Amour apprête ;
Mais ce dieu superbe et jaloux,
D’un œil de conquérant regardant sa conquête,
Fit bientôt aux plaisirs succéder les dégoûts.
Un cœur jaloux ne fait paraître
Que des feux qui le font haïr ;
Et, pour être toujours le maître,
L’amant doit toujours obéir.
L’Amour ne vа point sans les Grâces ;
On n’arrache point ses faveurs ;
L’emportement ni les menaces
Ne font point le lien des cœurs.
Un cœur jaloux ne fait paraître
Que des feux qui le font haïr ;
Et, pour être toujours le maître,
L’amant doit toujours obéir.
La déesse déjà ne craint plus son absence ;
Et, cessant de l’aimer sans s’en apercevoir,
Fait atteler son char, pleine d’impatience,
Et vole vers les bords soumis à son pouvoir.
Là ses jours coulaient sans alarmes,
Lorsqu’un jeune chasseur se présente à ses yeux :
Elle croit voir son fils : il en a tous les charmes ;
Jamais rien de plus beau ne parut sous les cieux ;
Et le vainqueur de l’Inde était moins gracieux,
Le jour que d’Ariane il vint sécher les larmes.
La froide Naïade
Sort pour l’admirer ;
La jeune Dryade
Cherche à l’attirer.
Faune, d’un sourire,
Approuve leur choix :
Le jaloux Satyre
Fuit au fond des bois ;
Et Pan, qui soupire,
Brise son hautbois.
Il aborde en tremblant la charmante déesse :
La timide pudeur relève ses appas :
Les Grâces, les Ris, la Jeunesse,
Marchent au devant de ses pas ;
Et du plus haut des airs, l’Amour avec adresse,
Fait partir, à l’instant, le trait dont il les blesse.
Que désormais Mars en fureur
Gronde, menace, tonne, éclate ;
Amants, profitez tous de sa jalouse erreur.
Des feux trop violents font souvent une ingrate :
On oublie aisément un amour qui fait peur,
En faveur d’un amour qui flatte.
Que le soin de charmer
Soit votre unique affaire ;
Songez que l’art d’aimer,
N’est que celui de plaire.
Voulez-vous dans vos feux
Trouver des biens durables ?
Soyez moins amoureux ;
Devenez plus aimables.
Que le soin de charmer
Soit votre unique affaire ;
Songez que l’art d’aimer
N’est que celui de plaire.