Mon âme elle est là-bas

Mon âme elle est là-bas,
Mon âme en joie et en alarmes,
Elle est là-bas
Où l’on s’élance, où l’on se bat,
Mon âme elle est là-bas,
Dans les clameurs et dans les armes.

Elle s’exalte et pleure et rit au long du jour.
L’annonce des combats lui est lueur et flamme ;
Mon âme,
Au long des heures et des jours,
N’est plus qu’une pensée et n’est plus qu’un amour.

Mon âme ? — elle est ardente et rayonnante.
Elle fouille sa mémoire
Pour y ressusciter l’orgueil enseveli
De la légende et de l’histoire.
Elle est ardente et frissonnante ;
Elle se cache et se blottit
En vos grands plis,
Drapeaux, qui promenez sur le monde la gloire.

Elle guette votre venue,
Tambours qui débouchez du fond de l’avenue,
Battants au clair, dans la lumière.
Mon âme ? — Elle sonne et vibre tout entière
Au rythme de vos pas,
Soldats,
Qui chantez en passant vos chansons familières.

Mon âme? — elle est déjà
Là-bas,
Dans la clarté de la victoire.
Tout lui devient ou signe ou geste évocatoires.

Elle est volante au vent
Vivant
Qui frôlera le front
De ceux qui reviendront,
Avec l’épaule en sang ou la main mutilée,
Des corps à corps de la mêlée.
Elle est l’ardeur, elle est la foi.
Elle trépide et crie et follement acclame,
Car l’avenir lui parle et lui chante à la fois,
Et pleurante d’émoi,
Elle écoute, mon âme !

Collection: 
1916

More from Poet

Le corps ployé sur ma fenêtre,
Les nerfs vibrants et sonores de bruit,
J'écoute avec ma fièvre et j'absorbe, en mon être,
Les tonnerres des trains qui traversent la nuit.
Ils sont un incendie en fuite dans le vide.
Leur vacarme de fer, sur les plaques des ponts,...

Lorsque la pourpre et l'or d'arbre en arbre festonnent
Les feuillages lassés de soleil irritant,
Sous la futaie, au ras du sol, rampe et s'étend
Le lierre humide et bleu dans les couches d'automne.

Il s'y tasse comme une épargne ; il se recueille
Au coeur de la...

D'énormes espaliers tendaient des rameaux longs
Où les fruits allumaient leur chair et leur pléthore,
Pareils, dans la verdure, à ces rouges ballons
Qu'on voit flamber les nuits de kermesse sonore.

Pendant vingt ans, malgré l'hiver et ses grêlons,
Malgré les gels...

Les horizons cuivrés des suprêmes automnes
Meurent là-bas, au loin, dans un carnage d'or.
Où sont-ils les héros des ballades teutonnes
Qui cornaient, par les bois, les marches de la Mort ?

Ils passaient par les monts, les rivières, les havres,
Les burgs - et...

Oh ! la maison perdue, au fond du vieil hiver,
Dans les dunes de Flandre et les vents de la mer.

Une lampe de cuivre éclaire un coin de chambre ;
Et c'est le soir, et c'est la nuit, et c'est novembre.

Dès quatre heures, on a fermé les lourds volets ;
Le mur est...