C’est la fête ; la fête en or des fumiers gras.
On la voit s’avancer sur des chemins de boue,
À travers les hameaux flamands, serrés en tas,
Autour de longs marais où les foulques s’échouent.
Une odeur lourde et violente envahit l’air
Et se mêle aux brouillards qui, dès le matin, fument ;
Et midi la dilate avec ses rayons clairs
Et les bêtes des prés, le cou tendu, la hument.
Et les chevaux couplés tirent sur leurs fardeaux,
Et la route reluit sous les bouses bronzées,
Et de grands coups de fouet claquent vers les échos,
Comme pour réveiller les terres épuisées.
Et jusqu’au soir l’œil est témoin du va-et-vient
De lourds charrois visqueux où s’allument les pailles,
Et qui passent, massifs et lents, serrés et pleins,
Ici, là-bas, partout, où les sèves travaillent,
Partout où doit passer le soc et son tranchant,
Pour retourner le sol et graisser les cultures,
Et fermement, refaire, au cœur même des champs,
De la vie ample et belle, avec sa pourriture.