Le grillon et la rose

La rose un jour dit au grillon :
« C'est ton tour !... Déjà mainte abeille,
Déjà maint joli papillon
M'ont coulé des vers à l'oreille.

Parle, et dis-moi si mon collier,
Fait des perles de la rosée,
M'embellit, quand il vient briller
Aux feux de l'aurore irisée...

Tu me regardes tristement,
A mes pieds tu restes des heures ;
Mais tu chantes si doucement
Qu'il semble parfois que tu pleures !... »

Or, le grillon aimait la fleur.
« — O reine ! ma voix est sans charme,
Je n'ai pour moi que ma douleur !... »
... Et de ses yeux tombe une larme...

« — Des poètes sois le vainqueur,
Dit la rose, c'est toi que j'aime
Humble grillon ! à toi mon cœur !...
Une larme vaut un poème ! »

Collection: 
1887

More from Poet

Au déclin du jour, jeune fille,
Lorsqu'au balcon tu viens t'asseoir,
Derrière l'épaisse charmille,
Moi je me cache pour te voir.
Tendre interprète de ma flamme,
Chaque voix du soir, à son tour,
Ne vient-elle pas, ô chère âme !
En cet instant...

Seize ans vous couronnent de roses :
Toutes les grâces du printemps
Sur vos traits charmants sont écloses
Comme des bouquets éclatants.

Vous avez la rose à la joue,
Et chacune offre tour à tour
Une fraîche touffe où se joue
L’innocence près de l'amour...

O maître souverain ! Dieu de la poésie,
Dont la lyre régna sur le monde enchanté,
Tu meurs ! — Mais de ta gloire éclatante et choisie,
L'astre se lève au ciel de la postérité.

Désormais, à l'abri des retours de l'envie,
Ton nom prend un reflet d'éternelle clarté :...

Ici bas !

L'horreur règne ici bas... Dieu, tout fort qu'il se nomme,
A gémi de douleur, devenu fils de l'homme ;
Car rien n'est descendu sur ce monde odieux,
Qui ne fut teint du sang en retournant aux cieux !

L'arrêt irrévocable

Éternel...

Si de mai l'haleine envolée
Sur la vallée,
Mollement soupire et frémit,
Caressant la pelouse verte
De fleurs couverte
Nous disons : la terre sourit...

Si zéphyr, sur l'azur limpide
Des mers qu'il ride,
Baise l'ondine et la poursuit,
Tandis...