La Nue

À l’horizon monte une nue,
Sculptant sa forme dans l’azur :
On dirait une vierge nue
Émergeant d’un lac au flot pur.

Debout dans sa conque nacrée,
Elle vogue sur le bleu clair,
Comme une Aphrodite éthérée,
Faite de l’écume de l’air.

On voit onder en molles poses
Son torse au contour incertain,
Et l’aurore répand des roses
Sur son épaule de satin.

Ses blancheurs de marbre et de neige
Se fondent amoureusement
Comme, au clair-obscur du Corrège,
Le corps d’Antiope dormant.

Elle plane dans la lumière
Plus haut que l’Alpe ou l’Apennin ;
Reflet de la beauté première,
Sœur de « l’éternel féminin. »

À son corps, en vain retenue,
Sur l’aile de la passion
Mon âme vole à cette nue
Et l’embrasse comme Ixion.

La raison dit : « Vague fumée,
Où l’on croit voir ce qu’on rêva,
Ombre au gré du vent déformée,
Bulle qui crève et qui s’en va ! »

Le sentiment répond : « Qu’importe !
Qu’est-ce après tout que la beauté,
Spectre charmant qu’un souffle emporte,
Et qui n’est rien, ayant été !

« À l’Idéal ouvre ton âme ;
Mets dans ton cœur beaucoup de ciel,
Aime une nue, aime une femme,
Mais aime ! — C’est l’essentiel ! »

Collection: 
1831

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