L’Ondine et le Pêcheur

Tous les jours, écartant les roseaux et les branches,
Près du fleuve où j’habite un pêcheur vient s’asseoir
— Car sous l’onde il a vu glisser des formes blanches —
Et reste là, rêveur, du matin jusqu’au soir.

L’air frémit, l’eau soupire et semble avoir une âme,
Un œil bleu s’ouvre et brille au cœur des nénufars,
Un poisson se transforme et prend un corps de femme,
Et des bras amoureux, et de charmants regards.

              « Pêcheur, suis-moi ; je t’aime.
              Tu seras roi des eaux,
              Avec un diadème
              D’iris et de roseaux !

              « Perçant, sous l’eau dormante,
              Des joncs la verte mante,
              Auprès de ton amante
              Plonge sans t’effrayer :

              « À l’autel de rocailles,
              Prêt pour nos fiançailles,
              Un prêtre à mains d’écailles
              Viendra nous marier.

              « Pêcheur, suis-moi ; je t’aime.
              Tu seras roi des eaux,
              Avec un diadème
              D’iris et de roseaux ! »

Et déjà le pêcheur a mis le pied dans l’onde
Pour suivre le fantôme au regard fascinant :
L’eau murmure, bouillonne et devient plus profonde,
        Et sur lui se ferme en tournant...

              « De ma bouche bleuâtre,
              Viens, je veux t’embrasser,
              Et de mes bras d’albâtre
                    T’enlacer,
                    Te bercer,
                    Te presser !

              « Sous les eaux, de sa flamme
              L’amour sait m’embraser.
              Je veux, buvant ton âme,
                    D’un baiser
                    M’apaiser,
                    T’épuiser !... »

Collection: 
1841

More from Poet

  • Ó, asszonyom, nem önt szeretem én, de még a bájos Julia se bájol, nem félek a fehér Opheliától és nem gyulok fel Laura szemén. A kedvesem ott él Kínába kinn; agg szüleivel lakik ő nyugodtan egy hosszú, vékony porcellántoronyban a Sárga-folyó zúgó partjain. Ferdült szemében álmodó szigor,...

  • Je vis cloîtré dans mon âme profonde,
    Sans rien d'humain, sans amour, sans amis,
    Seul comme un dieu, n'ayant d'égaux au monde
    Que mes aïeux sous la tombe endormis !
    Hélas ! grandeur veut dire solitude.
    Comme une idole au geste surhumain,
    Je reste là, gardant...

  • Sur le coteau, là-bas où sont les tombes,
    Un beau palmier, comme un panache vert,
    Dresse sa tête, où le soir les colombes
    Viennent nicher et se mettre à couvert.

    Mais le matin elles quittent les branches ;
    Comme un collier qui s'égrène, on les voit
    S'...

  • Notre-Dame
    Que c'est beau !
    Victor HUGO

    En passant sur le pont de la Tournelle, un soir,
    Je me suis arrêté quelques instants pour voir
    Le soleil se coucher derrière Notre-Dame.
    Un nuage splendide à l'horizon de flamme,
    Tel qu'un oiseau géant qui va...

  • Seul un homme debout auprès d'une colonne,
    Sans que ce grand fracas le dérange ou l'étonne,
    A la scène oubliée attachant son regard,
    Dans une extase sainte enivre ses oreilles.
    De ces accords profonds, de ces hautes merveilles
    Qui font luire ton nom entre tous, - ô...