Aux hirondelles

 
De l’aile effleurant mon visage,
Volez, doux oiseaux de passage,
Volez sans peur tout près de moi !
Avec amour je vous salue ;
Descendez du haut de la nue,
Volez, et n’ayez nul effroi !

Des mois d’or aux heures légères,
Venez, rapides messagères,
Venez, mes sœurs, je vous attends !
Comme vous je hais la froidure,
Comme vous j’aime la verdure,
Comme vous j’aime le printemps !

Vous qui des pays de l’aurore
Nous arrivez tièdes encore,
Dites, les froids vont donc finir !
Ah ! contez-nous de jeunes choses,
Parlez-nous de nids et de roses,
Parlez-nous d’un doux avenir !

Parlez-moi de soleil et d’ondes,
D’épis flottants, de plaines blondes,
De jours dorés, d’horizons verts ;
De la terre enfin réveillée,
Qui se mourait froide et mouillée
Sous le dais brumeux des hivers.

L’hiver, c’est le deuil de la terre !
Les arbres n’ont plus leur mystère ;
Oiseaux et bardes sont sans toits ;
Une bise à l’aile glacée
A nos fronts tarit la pensée,
Tarit la sève au front des bois.

Le ciel est gris, l’eau sans murmure,
Et tout se meurt ; sur la nature
S’étend le linceul des frimas.
Heureux, alors, sur d’autres plages,
Ceux qui vont chercher les feuillages
Et les beaux jours des beaux climats !

O très heureuses hirondelles !
Si comme vous j’avais des ailes,
J’irais me baigner d’air vermeil ;
Et, loin de moi laissant les ombres,
Je fuirais toujours les cieux sombres
Pour toujours suivre le soleil !

Collection: 
1835

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