Amymone

Sur les rives d’Argos, près de ces bords arides
Où la mer vient briser ses flots impérieux,
      La plus jeune des Danaïdes,
Amymone, implorait l’assistance des dieux :
Un Faune poursuivait cette belle craintive ;
      Et levant ses mains vers les cieux :
Neptune, disait-elle, entends ma voix plaintive,
Sauve-moi des transports d’un amant furieux.

      À l’innocence poursuivie,
      Grand dieu, daigne offrir ton secours ;
      Protège ma gloire et ma vie
      Contre de coupables amours.

      Hélas ! ma prière inutile
      Se perdra-t-elle dans les airs ?
      Ne me reste-t-il plus d’asile
      Que le vaste abîme des mers ?

      À l’innocence poursuivie,
      Grand dieu, daigne offrir ton secours ;
      Protège ma gloire et ma vie
      Contre de coupables amours.

La Danaïde en pleurs faisait ainsi sa plainte,
Lorsque le dieu des eaux vint dissiper sa crainte ;
Il s’avance, entouré d’une superbe cour :
Tel, jadis, il parut aux regards d’Amphitrite,
      Quand il fit marcher à sa suite
      L’Hyménée et le dieu d’amour.
Le Faune, à son aspect, s’éloigne du rivage ;
      Et Neptune, enchanté, surpris,
L’amour peint dans les yeux, adresse ce langage
      À l’objet dont il est épris :

      Triomphez, belle princesse,
      Des amants audacieux :
      Ne cédez qu’à la tendresse
      De qui sait aimer le mieux.

      Heureux le cœur qui vous aime,
      S’il était aimé de vous !
      Dans les bras de Vénus même,
      Mars en deviendrait jaloux.

      Triomphez, belle princesse,
      Des amants audacieux :
      Ne cédez qu’à la tendresse
      De qui sait aimer le mieux.

Qu’il est facile aux dieux de séduire une belle !
Tout parlait en faveur de Neptune amoureux,
      L’éclat d’une cour immortelle,
Le mérite récent d’un secours généreux.
Dieux ! quel secours ! Amour, ce sont là de tes jeux.
Quel Satyre eût été plus à craindre pour elle ?
Thétis, en rougissant, détourna ses regards ;
Doris se replongea dans ses grottes humides,
Et, par cette leçon, apprit aux Néréides
      À fuir de semblables hasards.

      Tous les amants savent feindre ;
      Nymphes, craignez leurs appas :
      Le péril le plus à craindre
      Est celui qu’on ne craint pas.

      L’audace d’un téméraire
      Est aisée à surmonter :
      C’est l’amant qui sait nous plaire
      Que nous devons redouter.

Collection: 
1690

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