Études et préludes (1909)/« De ta robe à longs plis flottants »

 
        De ta robe à longs plis flottants
        Ruissellent toutes les chimères,
        Et tu m’apportes le printemps
        Dans tes mains blondes et légères.

        J’ai peur de ce frisson nacré
        De tes frêles seins, je ne touche
        Qu’en tremblant à ton corps sacré,
        J’ai peur du charme de ta bouche.

        Je me sens grandir jusqu’aux Dieux
        Quand, sous mon orgueilleuse étreinte,
        Le doux bleu meurtri de tes yeux
        S’évanouit, fraîcheur éteinte.

        Mais quand, si blanche entre mes bras,
        A mon cri d’amour qui se pâme
        Tu souris et ne réponds pas,
        Tes yeux fermés me glacent l’âme…

        J’ai peur, ― c’est le remords spectral
        Que l’extase ne saurait taire, ―
        De t’avoir peut-être fait mal
        D’une caresse involontaire.

Collection: 
1897

More from Poet

  • À Madame L.D. M...

    Le soir s'est refermé, telle une sombre porte,
    Sur mes ravissements, sur mes élans d'hier...
    Je t'évoque, ô splendide ! ô fille de la mer !
    Et je viens te pleurer comme on pleure une morte.

    L'air des bleus horizons ne gonfle plus tes seins,...

  • Le jour ne perce plus de flèches arrogantes
    Les bois émerveillés de la beauté des nuits,
    Et c'est l'heure troublée où dansent les Bacchantes
    Parmi l'accablement des rythmes alanguis.

    Leurs cheveux emmêlés pleurent le sang des vignes,
    Leurs pieds vifs sont légers...

  • Le soir était plus doux que l'ombre d'une fleur.
    J'entrai dans l'ombre ainsi qu'en un parfait asile.
    La voix, récompensant mon attente docile,
    Me chuchota: "Vois le palais de la douleur".

    Mes yeux las s'enchantaient du violet, couleur
    Unique car le noir dominait....

  • Le soir, ouvrant au vent ses ailes de phalène,
    Évoque un souvenir fragilement rosé,
    Le souvenir, touchant comme un Saxe brisé,
    De ta naïveté fraîche de porcelaine.

    Notre chambre d'hier, où meurt la marjolaine,
    N'aura plus ton regard plein de ciel ardoisé,
    Ni...

  • Ô Sommeil, ô Mort tiède, ô musique muette !
    Ton visage s'incline éternellement las,
    Et le songe fleurit à l'ombre de tes pas,
    Ainsi qu'une nocturne et sombre violette.

    Les parfums affaiblis et les astres décrus
    Revivent dans tes mains aux pâles transparences
    ...