À une ombre aimée

 
    L’espoir de vivre ailleurs des jours clairs m’abandonne
    Et je célèbre ici la fête de l’automne.

    Au-dessus de ma porte, avec un regret doux
    Et chantant, je suspends les guirlandes d’or roux

    Qu’une femme au regard que nulle mort n’étonne
    Vint tresser, en pleurant sur la mort de l’automne…

    Ma maîtresse d’hier, nous ne fûmes jamais
    Un couple harmonieux… Autrefois, je t’aimais..

    Je goûte en ce baiser que ta bouche me donne
    L’odeur de l’herbe humide et des feuilles d’automne,

    L’odeur lourde des lourds raisins, et cette odeur
    De pavots morts que jette au loin le vent rôdeur…

    Seule dans mon jardin fané je me couronne
    De feuillages et de violettes d’automne…

Collection: 
1897

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À Madame L.D. M...

Le soir s'est refermé, telle une sombre porte,
Sur mes ravissements, sur mes élans d'hier...
Je t'évoque, ô splendide ! ô fille de la mer !
Et je viens te pleurer comme on pleure une morte.

L'air des bleus horizons ne gonfle plus tes seins,...

Le jour ne perce plus de flèches arrogantes
Les bois émerveillés de la beauté des nuits,
Et c'est l'heure troublée où dansent les Bacchantes
Parmi l'accablement des rythmes alanguis.

Leurs cheveux emmêlés pleurent le sang des vignes,
Leurs pieds vifs sont légers...

Le soir était plus doux que l'ombre d'une fleur.
J'entrai dans l'ombre ainsi qu'en un parfait asile.
La voix, récompensant mon attente docile,
Me chuchota: "Vois le palais de la douleur".

Mes yeux las s'enchantaient du violet, couleur
Unique car le noir dominait....

Le soir, ouvrant au vent ses ailes de phalène,
Évoque un souvenir fragilement rosé,
Le souvenir, touchant comme un Saxe brisé,
De ta naïveté fraîche de porcelaine.

Notre chambre d'hier, où meurt la marjolaine,
N'aura plus ton regard plein de ciel ardoisé,
Ni...

Ô Sommeil, ô Mort tiède, ô musique muette !
Ton visage s'incline éternellement las,
Et le songe fleurit à l'ombre de tes pas,
Ainsi qu'une nocturne et sombre violette.

Les parfums affaiblis et les astres décrus
Revivent dans tes mains aux pâles transparences
...