À Émile ZOLA.
La fabrique est sale et morose,
L’air infect et la vitre en deuil ;
J’y fais toujours la même chose,
J’y tourne comme l’écureuil.
Aussi j’ai du plomb dans la veine,
Je me rouille dans mon étui.
La ribotte a bu ma quinzaine.
Que voulez-vous ? Il faut tuer l’ennui !
Oh ! vivre sous le ciel d’Afrique,
Arabe ou lion, librement !...
Je ne sais rien en politique,
Mais j’ai besoin de mouvement !
La rue éclate en fusillades,
Le peuple va droit devant lui ;
Allons faire des barricades !...
Que voulez-vous ? il faut tuer l’ennui !
Feu ! toujours feu ! je suis la foudre,
Mon âme bout dans mon fusil ;
On met la gloire dans la poudre,
On ne la met pas dans l’outil.
Mais je tombe comme un homme ivre,
Une balle au flanc ― bonne nuit ! ―
Mourir ainsi, du moins c’est vivre.
Que voulez-vous ? il faut tuer l’ennui !
Paris, juin 1848.