• La nuit avait semé ses nuages limpides
    Tout autour de la lune, astre rêveur et blanc,
    Qui, du ciel bleu foncé sur l'onde au pâle flanc,
    Semblait faire pleuvoir l’argent en jets fluides.
     
    La voile, au long du mât, pendait pleine de rides
    Tant la brise était molle et le flot somnolent.
    Mes songes balancés au gré du bateau lent,
    Suivaient la vision...

  • La haute cathédrale est grise, presque noire,
    Et découpe un profil austère sur les cieux.
    Une voix vague sort des blocs silencieux :
    Dans leur langue gothique [2] ils nous disent de croire.

    C’est le reflet et c’est la vivante mémoire
    Des âges d’autrefois sauvages et pieux.
    On sent qu’en...

  • Sur le mur décrépit du cloître ancien et froid,
    À droite, dans le fond de la salle où l’on croit
    Sentir l’horreur des lieux où reviennent des ombres,
    Voilée, et recevant des vitres toujours sombres
    Le peu de jour qui sied à la paix des tombeaux,
    Une peinture encor fière, presque en lambeaux,
    Se dresse ; on ne voit qu’elle en entrant : c’est la Cène.
    La...

  • Vous êtes la beauté. Vers la pure Ionie [2]
    C’est de vous que naquit Vénus [3] au temps des dieux,
    Et vous avez formé son corps victorieux
    De votre onde mobile à la lumière unie.

    C’est vous, près des vaisseaux, qui faisiez l’...

  • Coteaux fins aux grands cyprès noirs,
    Pour faire vos gammes exquises
    Vous n’avez pas besoin des soirs
    Ni des aurores indécises.

    Dans les claires heures du jour,
    Vous dressez, couronné de vignes,
    Vers le ciel tendre avec amour,
    Votre front grec aux belles lignes.

    Sereins et purs, point élevés,
    Votre harmonie où l’azur flotte
    Déroule...

  •  
    Eh bien ! jeunes rivaux, que la lutte commence ;
    Oui, chantez tour à tour.
    VIRGILE, Églog., trad. de Firmin Didot.

    La pièce suivante fait allusion aux Epîtres que se sont
    adressées MM. de Lamartine et Casimir Delavigne.

    J’aime à voir dans ces chants, nobles fils du génie,
    Qu’enfantait immortels l’aveugle d’Ionie,
    L’...

  •  
    Les derniers visiteurs sortaient du cimetière.
    C’était à l’heure calme où le soleil s’endort :
    Avant de s’engloutir dans son lit de lumière,
    Il avait embrasé le ciel de Thermidor.

    Le saule que Musset réclama sur sa pierre
    Épanchait de verts pleurs au sein des rayons d’or,
    Et le chant d’un bouvreuil, ainsi qu’une prière
    Pour les ensevelis,...

  •  
    Le grand Niagara s’écoule, le Rhin tombe ;
    L’abîme monstrueux tâche d’être une tombe,
    Il hait le géant fleuve, et dit : j’engloutirai.
    Et le fleuve, pareil au lion attiré
    ...

  •  

    Autrefois, dans les jours de ma jeunesse ardente,
    Quand l’éclat des grands noms éblouissait mes yeux,
    Mes poètes aimés c’étaient Eschyle, Dante,
    Camoëns et Byron, Byron l’audacieux ;
    C’était au divin bruit de leurs hymnes de flamme
    C’était en les nommant que je lançais mon âme,
    Comme un char à travers les cieux.

    Ici, sur les hauteurs de la...

  •  
    L’ombre nous semble une ennemie en embuscade…
    Viens, je t’emporterai comme une enfant malade,
    Comme une enfant plaintive et craintive et malade.

    Entre mes bras nerveux j’étreins ton corps léger.
    Tu verras que je sais guérir et protéger,
    Et que mes bras sont forts pour mieux te protéger.

    Les bois sacrés n’ont plus d’efficaces dictames,
    Et le...