• Je n'emporte avec moi sur la mer sans retour
    Qu'une rose cueillie à notre long amour.
    J'ai tout quitté; mon pas laisse encore sur la grève
    Empreinte au sable insoucieux sa trace brève
    Et la mer en montant aura vite effacé
    Ce vestige incertain qu'y laissa mon passé.
    Partons! que l'âpre vent en mes voiles tendues
    Souffle et m'entraîne...

  •  
    La lampe des longs soirs projette un rayon d’ambre
    Sur les cadres dont elle estompe les vieux ors.
    L’heure de mon départ a sonné dans la chambre…
    La nuit est noire et je ne vois rien au-dehors.

    Je ne reconnais plus le visage des choses
    Qui furent les témoins des jours bons et mauvais…
    Voici que meurt l’odeur familière des roses…
    La nuit est...

  •  
    I

    En quittant le collège, abri calme et dormant,
    J’ai pleuré mon enfance et j’ai confusément
    Senti qu’un peu de moi restait là, dans la pierre !
     
    L’habitude est si douce au cœur, si familière !
    Et j’avais dès longtemps pris celle de m’asseoir
    Dans la salle d’étude, après les jeux, le soir,
    D’écrire, de rêver, les mains contre les tempes...

  •  
    QUE la route vous soit fleurie,
    Pleine de parfums et de chants,
    Vous qui sur les coteaux penchants
    Allez cueillir la Rêverie.

    Que la Nature vous sourie,
    Vous donnant l’oubli des méchants,
    Et puisse être la clef des champs
    Légère à votre main chérie.

    Moi je demeure et me souviens ;
    Car ils sont loin de moi les biens
    Dont le...

  • Avec leur chat, avec leur chien,
    Avec, pour vivre, quel moyen ?
    S’en vont, le soir, par la grand’route,
    Les gens d’ici, buveurs de pluie,
    Lécheurs de vent, fumeurs de brume

    Les gens d’ici n’ont rien de rien,
    Rien devers eux
    Que l’infini, ce soir, de la grand’route.
     
    Chacun porte au bout d’une gaule,
    En un mouchoir...

  •  
    Départ des Amazones Françaises des 83 départements pour les frontières (1792)
    ou
    Chanson nouvelle

    Réjouissez-vous, patriotes,
    Vous allez avoir du secours ;
    Les filles, femmes en ribotte
    Veulent se combattre à leur tour. (bis)
    A la tête des Volontaires,
    On verra ce sexe charmant,
    D'...

  • Depuis un mois il neige à flots. La nuit dernière
    Il a plu. Maintenant sous la froide lumière
    Du soleil hivernal le givre immaculé
    Étincelle aux rameaux du grand bois constellé.
    Quel séduisant tableau ! quelle vaste féerie !
    Chaque fourré devient une cristallerie ;
    Et les blancheurs du lait, de la nacre, du sel,
    De l’onyx, de l’argent, de la nappe d’...

  •  
    Vous que j’ai tant aimé, ô vous dont l’œil m’évite,
    Si le hasard encor me plaçait sur vos pas,
    Tremblante, à mes regards ne fuyez pas si vite,
             De moi ne vous détournez pas.

    Ne vous détournez pas ! Dans sa noble innocence,
    Mon cœur s’étonne et souffre au trouble où je vous voi.
    Si d’un trop haut amour la femme un jour s’offense,...

  •  
    Quand l’être cher vient d’expirer,
    On sent obscurément la perte,
    On ne peut pas encor pleurer :
    La mort présente déconcerte ;

    Et ni le lugubre drap noir,
    Ni le dies irae farouche,
    Ne donnent forme au désespoir :
    La stupeur clôt l’âme et la bouche.

    Incrédule à son propre deuil,
    On regarde au fond de la tombe,
    Sans rien...

  • O Vierges ! n’est-ce pas qu’autour de mon supplice,
    Vos danses mèneront, sous la lune complice,
    Une orgie en démence au rythme bondissant,
    Et, de l’antique Olympe ébranlant les murailles,
    Feront mes funérailles
    ...