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    La nuit d’hiver descend sur le grand bois mouvant.
    Du ciel blafard la neige à flots tombe, et le vent
    Siffle et hurle à travers les troncs couverts de glace
    Des arbres dépouillés qui tordent dans l’espace
    Leurs longs bras forcenés comme de noirs démons.
    L’ouragan, dévalant de la cime des monts,
    De rires effrayants et de sanglots funèbres
    Emplit...

  • Laigle noir aux yeux d’or, prince du ciel mongol,
    Ouvre, dès le premier rayon de l’aube claire,
    Ses ailes comme un large et sombre parasol.

    Un instant immobile, il plane, épie et flaire.
    Là-bas, au flanc du roc crevassé, ses aiglons
    ...

  •  
    I

    Vous qui, lorsque les loups hurlent dans les clairières,
    Chantez sous vos plafonds constellés de lumières,
    Ou venant vous asseoir devant l’âtre vermeil,
    Courez, du coin du feu, le val et la montagne,
    Faites des rêves d’or, des châteaux en Espagne
         Qu’achève ensuite un doux sommeil ;

    Qui dédaignant la foi de vos pieuses mores,
    ...

  • Je suis enfant de la montagne,
    Comme l’isard, comme l’aiglon ;
    Je ne descends dans la campagne
    Que pour ma poudre et pour mon plomb ;
    Puis je reviens, et de mon aire
    Je vois en bas l’homme ramper,
    Si haut placé que le tonnerre
    Remonterait pour me frapper.

    Je n’ai pour boire, après ma chasse,
    Que l’eau du ciel dans mes deux mains ;
    ...

  • Il tire aussi bien qu’il pérore,
    Le grand curé sec et rustaud.
    — Pour s’en aller chasser plus tôt,
    Il dit sa messe dès l’aurore.

    Ce n’est pas en vain qu’il explore
    Le bois, la brande et le plateau !
    Il tire aussi bien qu’il pérore,
    Le grand curé sec et rustaud.

    Mais son tricorne qu’il décore
    D’une plume de cailleteau
    Se profile au...

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    Je comprends que le chat ait frappé Baudelaire
    Par son être magique où s’incarne le sphinx ;
    Par le charme câlin de la lueur si claire
    Qui s’échappe à longs jets de ses deux yeux de lynx,
    Je comprends que le chat ait frappé Baudelaire.

    Femme, serpent, colombe et singe par la grâce,
    Il ondule, se cambre et regimbe aux doigts lourds ;
    Et lorsque...

  • Le chat est auprès du feu ; le pot bout.
          Cette cuisine est très noire
    et deux saucisses rouges sont au bout
          d’une vieille canne noire.

    Il pleut sur le vitrage de la cour.
          Les vitres sont toutes noires,
    et dehors la pluie qui est fine court
          devant les fenêtres noires.

    Je pense que je voudrais bien baiser,
          ...

  • Un angora, que sa maîtresse
    Nourrissait de mets délicats,
    Ne faisait plus la guerre aux rats:
    Et les rats, connaissant sa bonté, sa paresse,
    Allaient, trottaient partout, et ne se gênaient pas....

  • « Est-il sur un arbre où dans un creux de roche ?
    « C’est drôle, ce cri qui part on ne sait d’où !
    « Et puis, cet horrible et triste miaou
    « Tantôt vient de loin et tantôt se rapproche.

    « En vain je regarde ! En vain ma canne embroche
    « Les buissons, et rôde au fond de chaque trou !
    « Est-il sur un arbre ou dans un creux de roche ?
    « C’est drôle, ce...

  • — « Oh ! chère mignonne, tu saignes ! »
    Et je suçai son joli doigt,
    Comme tout amoureux le doit.
    Gare aux piqûres de châtaignes !

    Libres des grands et petits peignes,
    Ses cheveux flottaient dans l’air froid.
    — « Oh ! chère mignonne, tu saignes ! »
    Et je suçai son joli doigt.

    — « Fi ! c’est mal qu’ainsi tu m’étreignes. »
    C’était l’heure...