• Aux temps païens, toujours devant les temples fume
    L’hécatombe, des dieux apaisant le courroux.
    Vénus veut cent ramiers ; Jupiter, cent bœufs roux.
    Pour ma déesse, moi, je n’ai rien qu’une plume !

    Et j’ose dans l’azur, dont l’encens fait la brume
    Chez les Olympiens, m’élever jusqu’à vous,
    Et sur le blanc autel de vos divins genoux
    Déposer en...

  • Le sot confond la rose avec la renoncule,
    Ferme l’or et la merde au même cadenas,
    Gamahuche le con et lèche la fistule,
    Et ne distingue point le chou de l’ananas.

  •      Si quelque jeune fée à l’aile de saphir,
                   Sous une sombre et fraîche arcade,
         Blanche comme un reflet de la perle d’Ophir,
         Surgissait à mes yeux, au doux bruit du zéphyr,
                   De l’écume de la cascade,

         Me disant : « Que veux-tu ? larges coffres pleins d’or,
                   Palais immenses, pierreries ?
         ...

  • Biorn, étrange cénobite,
    Sur le plateau d’un roc pelé,
    Hors du temps et du monde, habite
    La tour d’un burg démantelé.

    De sa porte l’esprit moderne
    En vain soulève le marteau :
    Biorn verrouille sa poterne
    Et barricade son château.

    Quand tous ont les yeux vers l’aurore,
    Biorn, sur son donjon perché,
    À l’horizon contemple encore...

  • Ce cavalier qui court vers la montagne,
          Inquiet, pâle au moindre bruit,
    C’est Boabdil, roi des Mores d’Espagne,
          Qui pouvait mourir, et qui fuit !

    Aux Espagnols Grenade s’est rendue ;
          La croix remplace le croissant,
    Et Boabdil pour sa ville perdue
          N’a que des pleurs et pas de sang...

    Sur un rocher nommé Soupir-du-More,...

  • Tout près du lac filtre une source,
    Entre deux pierres, dans un coin ;
    Allègrement l’eau prend sa course
    Comme pour s’en aller bien loin.

    Elle murmure : « Oh ! quelle joie !
    Sous la terre il faisait si noir !
    Maintenant ma rive verdoie,
    Le ciel se mire à mon miroir.

    « Les myosotis aux fleurs bleues
    Me disent : ‹ Ne m’oubliez pas ! ›...

  • Deux estions et n’avions qu’ung cœur.
    Le Lay de maistre Ytier Marchant.

    Hélas ! Il n’estoit pas saison
    Si tôt de son département.
    La Complainte de Valentin Granson.

    D’elle que reste-t-il aujourd’hui ? Ce qui reste,
    Au réveil d’un beau rêve, illusion céleste ;
    Ce qui reste l’hiver des parfums du printemps,
    De l’...

  • Soulève ta paupière close
    Qu’effleure un songe virginal ;
    Je suis le spectre d’une rose
    Que tu portais hier au bal.
    Tu me pris encore emperlée
    Des pleurs d’argent de l’arrosoir,
    Et parmi la fête étoilée
    Tu me promenas tout le soir.

    Ô toi qui de ma mort fus cause,
    Sans que tu puisses le chasser,
    Toute la nuit mon spectre rose
    À...

  • Dans le Jardin Royal ou l’on voit les statues,
    Une Chimère antique entre toutes me plait ;
    Elle pousse en avant deux mamelles pointues,
    Dont le marbre veiné semble gonflé de lait ;

    Son visage de femme est le plus beau du monde ;
    Son col est si charnu que vous l’embrasseriez ;
    Mais quand on fait le tour, on voit sa croupe ronde,
    On s’apercoit qu’elle...

  • Vous ne connaissez pas les molles rêveries
    Où l’âme se complaît et s’arrête longtemps,
    De même que l’abeille, en un soir de printemps,
    Sur quelque bouton d’or, étoile des prairies ;

    Vous ne connaissez pas cet inquiet désir
    Qui fait rougir souvent une joue ingénue,
    Ce besoin d’habiter une sphère inconnue,
    D’embrasser un fantôme impossible à saisir,...