• Lorsque la pourpre et l'or d'arbre en arbre festonnent
    Les feuillages lassés de soleil irritant,
    Sous la futaie, au ras du sol, rampe et s'étend
    Le lierre humide et bleu dans les couches d'automne.

    Il s'y tasse comme une épargne ; il se recueille
    Au coeur de la forêt comme en un terrain clos,
    Laissant le froid givrer ses ondoyants îlots
    Disséminés...

  • Le corps ployé sur ma fenêtre,
    Les nerfs vibrants et sonores de bruit,
    J'écoute avec ma fièvre et j'absorbe, en mon être,
    Les tonnerres des trains qui traversent la nuit.
    Ils sont un incendie en fuite dans le vide.
    Leur vacarme de fer, sur les plaques des ponts,
    Tintamarre si fort qu'on dirait qu'il décide
    Du rut d'un cratère ou des chutes d'un mont....

  • Des hameaux éloignés retiennent ma compagne.
    Hélas ! Dans ces forêts qui peut se plaire encor ?
    Flore même à présent déserte la campagne
    Et loin de nos bergers l'amour a pris l'essor.

    Doris vers ce coteau précipitait sa fuite,
    Lorsque de ses attraits je me suis séparé :
    Doux zéphyr ! si tu sors du séjour qu'elle habite,
    Viens ! que je sente au...

  • Nise était dans son aurore,
    Et sur son sein agité,
    Déjà commençaient d'éclore
    Les trésors de la beauté :
    Sur ses lèvres demi-closes
    Erraient déjà les soupirs,
    Comme autour des jeunes roses
    On voit voler les zéphyrs.

    Nise avait vu le feuillage
    Seize fois naître et mourir :
    Silvandre était du même âge ;
    C'est l'âge heureux du...

  • Pourquoi ne me rendez-vous pas
    Les doux instants de ma jeunesse ?
    Dieux puissants ! ramenez la course enchanteresse
    De ce temps qui s'enfuit dans la nuit du trépas !
    Mais quelle ambition frivole !
    Ah ! dieux ! si mes désirs pouvaient être entendus,
    Rendez-moi donc aussi le plaisir qui s'envole
    Et les amis que j'ai perdus !

    Campagne d'Arpajon !...

  • (Fragments)

    ... Quelle touchante paix me suit dans ces retraites !
    Forêt inaccessible à l'ardente chaleur,
    Quel plaisir de rêver dans tes routes secrètes !
    Ces pins semblent porter, sur leur front sourcilleux,
    La voûte où le soleil se couronne de feux ;
    La méditation qui plane sur ma tête,
    Dans leur profond dédale, à chaque pas m'arrête :
    L'...

  • Non mon esprit vous n'êtes sot,
    Mais onc ne fûtes Philosophe,
    Point n'est sagesse votre lot,
    Pourtant ne manquez pas d'étoffe.

    Point trop mal vous dites le mot,
    Assez bien raillez sans déplaire,
    Or un sot ne le pourrait faire :
    Non mon esprit vous n'êtes sot.

    Mais flatter ne fut mon métier,
    Partant souffrez cette apostrophe ;
    Bien...

  • Une nuit que le dieu Morphée,
    Sur ma paupière comprimée
    Distillait ses plus doux pavots,
    Je vis en songe dans la nue,
    Un vieillard à tête chenue,
    Qui me fit entendre des mots :

    Bellone va fuir exilée,
    L'Europe de sang abreuvée
    La repousse au fond des déserts ;
    Et Georges ce roi formidable,
    Domptant le Français indomptable,
    Rendra la...

  • Petit jardin que j'ai planté
    Que ton enceinte sait me plaire !
    Je vois en ta simplicité,
    L'image de mon caractère.

    Pour rêver qu'on s'y trouve bien !
    Ton agrément c'est la verdure ;
    A l'art tu ne dois presque rien,
    Tu dois beaucoup à la nature.

    D'un fleuve rapide en son cours,
    Tes murs viennent toucher la rive,
    Et j'y vois s'écouler...

  • C'était, dans la nuit brune,
    Sur le clocher jauni,
    La lune
    Comme un point sur un i.

    Lune, quel esprit sombre
    Promène au bout d'un fil,
    Dans l'ombre,
    Ta face et ton profil ?

    Es-tu l'oeil du ciel borgne ?
    Quel chérubin cafard
    Nous lorgne
    Sous ton masque blafard ?

    N'es-tu rien qu'une boule,
    Qu'un grand faucheux...