• [...] L'eau sortant des canaux s'égaye en ces prés verts,
    Comme marche un captif déchargé de ses fers.
    Elle était dans sa gêne et morne et languissante :
    Libre elle est babillarde, active et bondissante.
    Elle aime mieux, folâtre et toujours serpentant,
    Par ces chemins tortus courir en s'ébattant ;
    Elle aime mieux baiser et ces fleurs et ces herbes
    Qu'un...

  • Que les jours sont charmants, quand les volantes nues
    Étendent sur nos chefs leurs ombres continues,
    Et cachant du soleil la trop grande splendeur,
    Tempèrent sa lumière et domptent son ardeur !
    Sans attendre du soir l'heure moins éclairée,
    Je puis abandonner la demeure dorée ;
    Et dans un air plus libre, un lieu moins fréquenté
    Peut donner aux pensers...

  • Que j'aime la nuit fraîche et ses lumières sombres,
    Lorsque l'astre des mois en adoucit les ombres !
    Que ce palais pompeux me parait bien plus beau
    Quand il n'est éclairé que du second flambeau,
    Dont la douce clarté d'autres grâces apporte,
    Réchauffant les reliefs par une ombre plus forte.
    Sous la corniche aiguë, une longue noirceur
    Sur le mur qui la...

  • Plus charmante qu'Omphale et plus que Déjanire,
    Philis en se jouant pirouette un fuseau,
    Mais un fuseau d'ébène, aussi riche que beau,
    Mais d'un air si galant qu'on ne le saurait dire.

    Il tourne, il se grossit ; de celui qu'elle tire
    Il descend ; il remonte et descend de nouveau,
    Et de ses doigts d'albâtre elle trempe dans l'eau
    Cet invisible fil...

  • Enfin la belle Aurore, a tant versé de pleurs,
    Que l'aimable Printemps nous fait revoir ses charmes ;
    Il peint en sa faveur, les herbes et les fleurs,
    Et tout ce riche Émail, est l'effet de ses larmes.

    Cibèle que l'Hiver accablait de douleurs,
    Et qui souffrait des vents les insolents vacarmes ;
    Mêle parmi ses Tours, les plus vives couleurs,
    Et...

  • Environné de feux, et couvert de lumière,
    Tu sors de l'Océan, Astre de l'Univers ;
    Et des premiers rayons, de ta clarté première,
    Tu m'échauffes l'esprit, et m'inspires ces Vers.

    Tu brilles de splendeur ; tu brûles toutes choses ;
    Les Vallons les plus frais, en vain t'ont résisté
    Tu fais languir les Lis ; tu fais mourir les Roses ;
    Et la Neige est...

  • Ô Saison bienfaisante, aimable et douce Automne,
    Toi que le Soleil voit d'un regard tempéré ;
    Toi qui par les présents, que ta faveur nous donne,
    Fais arriver un bien, qu'on a tant espéré.

    Ce riche amas de fruits, dont ton front se couronne,
    Rend par tous nos Hameaux, ton Autel révéré ;
    L'Abondance te suit ; le Plaisir t'environne ;
    Mais un...

  • Les vents, même les vents, qu'on entend respirer,
    Et parmi ces rochers, et parmi ces ombrages,
    Eux qui me font aimer ces aimables rivages,
    Ont appris de Pétrarque à si bien soupirer.

    Les flots, même les flots, qu'on entend murmurer
    Avec tant de douceur, dans des lieux si sauvages,
    Imitent une voix qui charmait les courages
    Et parlent d'un objet qu'...

  • Esprits de plume et d'air, démons de l'inconstance,
    Qui ne trouvez jamais chez moi de résistance,
    Que je vous dois de voeux pour m'avoir fait savoir
    Que Philis, comme moi, cède à votre pouvoir !
    Nous vivons désormais francs de toute querelle,
    Chacun de nous suivra son humeur naturelle,
    Sans rendre nos désirs ni forcés, ni sujets ;
    Nous les attacherons...

  • Aimez ou n'aimez pas, changez, soyez fidèle,
    Tout cela pour Philis est fort indifférent ;
    Comme votre conquête a peu touché la belle,
    Elle perd votre coeur ainsi qu'elle le prend.

    L'on ne peut la nommer ni douce ni cruelle,
    Son insensible esprit ne combat ni se rend ;
    Elle entend les soupirs que l'on pousse pour elle,
    Mais ce coeur de rocher ne...