Rosine avecques moy pourroit parfaitement
Comme en un abrégé representer le monde,
Ma constance et ma foy, ferme immuable et ronde,
Retient les qualitez du plus bas element.
Le feu dedans mon coeur flambe eternellement,
Des larmes en mes yeux un Ocean abonde,
Et voylà qu'en mon sein la troupe vagabonde
Des vents de mes souspirs haleine incessamment...
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Quand nature forma d'un art industrieus
Cette beauté divine à nulle autre seconde,
Elle prit dans des feux qui font tousjours la ronde
Par le cercle estoilé, pour en faire ses yeux.
Elle mit le croissant sur son front gracieus,
Elle emprunta les rais du grand flambeau du monde,
Afin d'en colorer sa belle tresse blonde :
Bref, elle butina tout le... -
Ô belle Nuit, tu es évanouie,
Où sont logés tes chevaux furieux
Qui brunissaient d'une haleine obscurcie
Les monts, les vaux, les plaines et les cieux ?
Las où es-tu, Ténèbre gracieux,
Et vous Jupins qui souliez me conduire,
Donnez secours à mon mal ennuyeux,
Car sous votre ombre à son bien il aspire.
Ô liberté trop chèrement vendue,
Autre... -
Tu as beau me baiser, inconstante meurtrière,
Si j'oublie les mots que j'endure pour toi,
J'en suis si indigné quand je m'en ramentois
Que toujours je voudrais que tu me fusses fière.
Je voudrais que toujours ta rigueur fût entière,
Et que toujours ton feu s'irritât contre moi,
Afin que l'on connût plus clairement ma foi,
Mon amour, mon désir, et... -
L'âme qui en secret voit enterrer son corps,
Fait tout ce qu'elle peut pour en montrer la place,
Afin de recevoir des vivants cette grâce,
Qu'il soit mis au sépulcre honorable des morts.
Cependant animée elle se plaint des torts
Naguère à elle faits en suivant à la trace
Le meurtrier inconnu, qu'elle toujours menace
Des Furies d'enfer, où elle... -
Ô Nuit où je me perds, ténèbre affreux et sombre,
Pourquoi durez-vous tant ? Faites place aux flambeaux
Que vous tenez là-bas arrêtés sous les eaux,
Pour rendre à mon malheur plus obscure votre ombre.
J'aime mieux demeurer pour jamais en encombre
Entouré de silence, entre ces deux tombeaux,
Que d'être en rien tenu à ces deux Soleils beaux,
Deux... -
Vous qui n'ensorcelez les troupes vagabondes,
Mais toujours tourmentés, endurez tant de maux,
Voyez tant seulement baigner les animaux,
Et détournez vos yeux de ces sacrées ondes.
Gardez l'orage saint, ce sont les Nymphes blondes,
Actéon cerf fuyant, après tant de travaux
Fut enfin dévoré, et court par monts et vaux
Encore celui-là des cavernes... -
Sache que Palinure enseigna son vestige
Au Prince, descendu sur les stygiens bords,
Errant là-bas en peine, à cause que le corps
Qui n'a point de tombeau cent ans son âme afflige.
L'amoureuse pitié, Marie, ainsi t'oblige
De donner sépulture à moi, las, qui m'endors
D'un sommeil effroyable, et qui parmi les morts,
Laissant mes yeux gelés, ombre... -
Misérable désert en glaces éternelles,
Figure des enfers et séjour des démons,
Pourquoi demeurez-vous dans le flanc de ces monts ?
Recevez Apollon en vos antres mortelles.
Ô solitaire Dieu, où mes amours nouvelles
Me guident pour me plaindre au son de mes chansons,
Retenez de mon luth les plaintes et les sons
Qui louangent si doux mes peines... -
Que n'ai-je comme Bacchus
Cette puissance divine !
Jaloux, vous seriez vaincus
Par une feuille de vigne.
Ma Rozette me tiendrait,
Mais tout en votre présence,
Et douce me baiserait.
Que n'ai-je cette puissance ?
Je deviendrais beau raisin,
Elle, sans être aperçue,
Me mangerait grain à grain,
Devant sa mère déçue.
En raisin...