• Amour m'a découvert une beauté si belle
    Que je brûle et englace et en me consumant
    J'éprouve, tant me plaît ma flamme et mon tourment,
    Que qui meurt en aimant reprend vie immortelle.

    Comme l'unique oiseau de cette ardeur nouvelle
    Je renais, et ma flamme et son nom chèrement
    Je porte sur le dos au front du firmament
    Pour les faire reluire en sa...

  • Dieu ! que je suis heureux quand je baise à loisir
    Le pourpre soupirant de tes lèvres mollettes,
    Quand nous faisons frayer le bout de nos languettes
    D'une humide rencontre, ô Dieu, que de plaisir !

    Dieu ! que je suis heureux quand, ardent de désir,
    Je sens à petits flots les humeurs doucelettes
    De ta langue couler sur tes lèvres pourprettes ;
    D'un...

  • Je suis si transporté d'aise et d'étonnement
    Quand j'entre dans ces bois, les loges éternelles
    De Pan et des Sylvains et des Dryades belles,
    Qu'oubliant qui je suis, je perds le sentiment.

    Puis lorsque je reviens d'un tel ravissement,
    Plein d'admiration, par des sentes nouvelles,
    Tout ému, je m'égare où mes pensées fidèles
    Et mes désirs aimés me...

  • Mon dieu ! que de plaisir il y a de songer !
    J'ai songé cette nuit, ô ma chère maîtresse,
    Que je baisais ton sein, que je peignais ta tresse,
    Et qu'aux jeux amoureux je me sentais plonger.

    Noire Nuit, tu devais cette nuit allonger,
    Pour me faire jouir d'une si grand' liesse.
    Aurore, tu devais sommeiller en paresse
    Auprès de ton vieillard, sans du...

  • Que des sombres Enfers les tremblantes horreurs
    Viennent m'environner, les cavernes affreuses,
    Les fleuves ensoufrés, les âmes malheureuses,
    La mort, l'effroi, la peur, la rage et les fureurs,

    Que je sois assailli des horribles terreurs
    Du chien à trois gosiers, des Dires serpenteuses,
    Des fantômes volants et des ombres hideuses,
    De Titye étendu...

  • Peintre, avant que d'oser pourtraire
    Ma dame et de la contrefaire,
    Élève ton esprit aux cieux,
    Va là-haut apprendre des dieux
    Et des déesses immortelles
    Comme on peint les beautés plus belles,
    Puis de ton délié pinceau,
    Trace-moi dedans ce tableau
    Cette beauté que tant je prise,
    Et dont mon âme est tant éprise.
    Sus donc, détrempe tes...

  • Celui ne suis-je point, divine chasseresse,
    Qui veneur effronté t'aperçut dedans l'eau,
    Comme tu te baignais avecques ton troupeau,
    Veneur rendu la proie à sa meute traîtresse.

    De chasser n'ai-je garde étant pris en la tresse
    D'un or qui plus me tient d'autant qu'il est plus beau,
    Mais je le voudrais bien, et Actéon nouveau
    Mourir tout d'une fois...

  • Je te dois bien aimer, ô déesse Inconstance,
    Car tu m'as déchargé du faix de mes douleurs,
    Tu as éteint ma flamme et chassé mes malheurs,
    De mes maux plus cuisants me donnant allégeance.

    J'avais cru jusqu'ici, trop facile créance,
    Que la légèreté, l'espoir, et les erreurs,
    Te suivaient pas à pas, ministres des langueurs,
    Qui font que les Amants...

  • Ah ! que je suis fâché ! maudit soit le réveil
    Qui me prive du bien dont j'avais jouissance
    Cette nuit en songeant. Las ! depuis ma naissance,
    Je n'ai point eu de bien à celui-là pareil.

    Il me semblait qu'Amour, ennemi de tout deuil,
    Une moisson de fleurs versait en abondance,
    Dessus nos corps unis d'une ferme alliance.
    Ô songe délectable, ô...

  • Sur la sombre minuit qu'une liqueur miellée
    Avait sillé mes yeux d'un paresseux sommeil,
    Le Songe me fit voir en funeste appareil
    La Mort d'un long linceul piteusement voilée.

    Ce songe me dura tant que l'Aube emperlée
    D'un éclat d'orient ramenât le soleil,
    Et que devers les cieux à mon triste réveil
    Cette prière fît mon âme désolée :

    "...