• Laisse les nuages blancs passer au soleil.
    Il n’y a ici que toi, la terre et le ciel.
    Ne pense à presque rien. Douces comme du miel,

    auprès des cressons bleus les brebis viendront boire.
    La fille chantera dans la métairie noire,
    et sur la terre tiède il tombera des poires.

    La vieille tremblera sur le rouet tremblant,
    le bélier bêlera dans le...

  • Les lilas qui avaient fleuri l’année dernière
    vont fleurir de nouveau dans les tristes parterres.
    Déjà le pêcher grêle a jonché le ciel bleu
    de ses roses, comme un enfant la Fête-Dieu.
    Mon cœur devrait mourir au milieu de ces choses,
    car c’était au milieu des vergers blancs et roses
    que j’avais espéré je ne sais quoi de vous.
    Mon âme rêve sourdement...

  • Lorsque je serai mort, toi qui as des yeux bleus
    couleur de ces petits coléoptères bleu de feu
    des eaux, petite jeune fille que j’ai bien aimée
    et qui as l’air d’un iris dans les fleurs animées,
    tu viendras me prendre doucement par la main.
    Tu me mèneras sur ce petit chemin.
    Tu ne seras pas nue, mais, ô ma rose,
    ton col chaste fleurira dans ton...

  • La lune dans la nuit fait songer à la Terre
    Le Silence, fermant les yeux, entre en prière.

  • La maison serait pleine de roses et de guêpes.
    On y entendrait, l’après-midi, sonner les vêpres ;
    et les raisins couleurs de pierre transparente
    sembleraient dormir au soleil sous l’ombre lente.
    Comme je t’y aimerais. Je te donne tout mon cœur
    qui a vingt-quatre ans, et mon esprit moqueur,
    mon orgueil et ma poésie de roses blanches ;
    et pourtant je ne...

  •                       Les violes grincent,
                          Et les clavecins.
    Dans le salon bleu, les marquis très minces,
                          Les dames nu-seins,
    Avec des roideurs de marionnettes
                                  Muettes
                          Font un menuet
                                  Muet.

                          Ô têtes...

  • Nous sommes les anges que l’on ne peut pas voir
    parce que notre corps est en air et dans l’air.
    Nous pleurons de joie sur les mendiants amers
    quant pleut sur eux la pluie douce des sous verts et noirs.
    Nous ne connaissons pas les noms propres célèbres,
    car que nous fait à nous que la Terre soit ronde,
    car que nous fait à nous que la Mer soit profonde ?...

  • Ne me console pas. Cela est inutile.
    Si mes rêves qui étaient ma seule fortune
    quittent mon seuil obscur où s’accroupit la brume
    je saurai me résoudre et saurai ne rien dire.

    Un jour, tout simplement (ne me console pas !)
    devant ma porte ensoleillée je m’étendrai.
    On dira aux enfants qu’il faut parler plus bas.
    Et, délaissé de ma tristesse, je mourrai...

  • Quand le vieux Madécasse aux doigts noueux mourra,
    Les gens de l’Île, ceux de la Grève et des Mornes,
    Ses anciens amis, les noires maigres et mornes,
    Feront sa fosse, et la mer au loin chantera.

    Coiffé d’un vieux gibus, nu-jambes, un priera.
    Les autres souffleront de vieux airs dans des cornes,
    — Puis, au long des sentiers où s’enlacent des viornes,
    ...

  • Nous nous aimerons tant que nous tairons nos mots,
    en nous tendant la main, quand nous nous reverrons.
    Vous serez ombragée par d’anciens rameaux
    sur le banc que je sais où nous nous assoierons.
    C’est là que votre amie, cette fée du hameau,
    gracieuse comme au temps de Jean-Jacques Rousseau,
    et bonne comme on est quand on a bien souffert,
    c’est là, dans...