• L’impérissable orgueil de mon cœur vient de celle
    Qui daigna sur mon cœur poser son pied divin
    Très-fort & très-longtemps, afin qu’il se souvînt :
    — Depuis, je n’ai connu la douleur que par elle.

    Car j’ai souffert des maux qu’elle n’espérait pas.
    Fier du sillon saignant qu’elle ouvrit dans mon être
    Et qui des Dieux jaloux me fera reconnaître :
    — O...

  • Refleuris sous mon front, ô fleur de volupté,
    Fleur du rêve païen, fleur vivante & charnelle,
    Corps féminin qu’aux jours de l’Olympe enchanté
    Un cygne enveloppa des blancheurs de son aile.

    L’amour des Cieux a fait chaste ta nudité :
    Sous tes contours sacrés la fange maternelle
    Revêt la dignité d’une chose éternelle
    Et, pour vivre à jamais, s’...

  • Les Titans sont tombés : — dans l’air silencieux
    Leur sang pur monte encore, &, comme une fumée,
    Emporte dans les cieux leur âme consumée
    Des rêves éternels qu’ils avaient pris aux cieux.

    La terre, maternelle aux cœurs audacieux,
    Sur ses enfants meurtris lentement s’est fermée ;
    Mais, pour longtemps tari, son flanc capricieux
    Tira de leur semence...

  • N’étant plus qu’un brouillard vermeil,
    L’horizon dans la nuit recule :
    Je voudrais, comme le soleil,
    Mourir dans l’or d’un crépuscule !

    Sentir l’universel émoi,
    Suivre au loin ma trace blanchie
    Et, d’une grande ombre, après moi,
    Laisser la terre rafraîchie ;

    Descendre seul dans mon tombeau,
    Mais léguer mon âme à la nue
    Pour y...

  • Triste de quelque amour perdu,
    Rêvant aux délices passées,
    J’étais sur la terre étendu
    Parmi les bruyères froissées.

    L’ombre, en vibrant, montait dans l’air,
    Des arbres profonds vers la nue,
    Et la lune, au bord du ciel clair,
    Découvrait son épaule nue.

    Comme s’accroissait mon émoi
    De l’émoi fraternel des choses,
    Un rossignol, tout...

  • La poudre des astres brisés
    Roule encor par les étendues :
    Mais où vont le vent des baisers
    Et l’âme des amours perdues ?

    Comme des étoiles, nos cœurs
    Sont faits de lumière immortelle ;
    Ils se brisent aux chocs vainqueurs ;
    Mais leur poussière où donc va-t-elle ?

    Nous voyons couler notre sang
    Au bord de la nue enflammée,
    Dans le...

  • Comme une vierge au front vermeil
    Dans le jardin des cieux venue,
    L’Aube, ayant vaincu le sommeil,
    Cueille les fruits d’or de la nue.

    Dans l’azur, immense verger
    Des constellations fécondes,
    Elle passe d’un pas léger,
    Laissant flotter ses tresses blondes.

    Et les étoiles, tour à tour,
    Aux plis de sa robe jetées,
    Tombent, célestes...

  • Assis au revers d’un chemin,
    L’ombre en noyait les avenues —
    Tout seuls et la main dans la main
    Je baisais ses épaules nues.

    Blanche, la lune se levait ;
    — L’ombre en redoublait son mystère —
    Au moindre souffle tout avait
    Des frissons d’amour sur la terre.

    Et je respirais ses cheveux ;
    — L’ombre en buvait l’odeur suave —
    Et lui...

  • En vain Midi sur les cieux
    Tend ses lumineuses toiles ;
    Je cherche toujours leurs yeux
    Dans les couchants pleins d’étoiles.

    A la première allumée
    Sur le bord de l’horizon
    Je donne en pleurant ton nom,
    Ma première bien-aimée !

    Le regard descend sur moi
    De celle qui t’a suivie
    Et me rend l’ancien émoi :
    Car celle-là prit ma vie...